Archives par mot-clé : ASL

“Fumer est Haram!”

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Souheil Hammoud, surnommé Abou Taou, était l’un des principaux artilleurs de l’opposition syrienne à Bachar el-Assad, et il tua beaucoup de soldats loyalistes. Il appartenait à l’armée djihadiste de l’ASL, mais il aimait fumer, et il décida de défier al-Qaïda/Nosra, qui se donne aujourd’hui le nom de Fatah-ech-Cham.

Il pensait que les services qu’il avait rendus à l’opposition, et sa propre réputation de tueur de soldats syriens, lui procureraient l’impunité. Il se fit ainsi photographier fumant devant un des panneaux placés par al-Nosra sur les routes: “Fumer est haram. Le narguilé est haram”, et signés “Vos frères moudjahidine”. Et il publia cette photo sur les réseaux sociaux.

Souheil Hammoud, de l’ASL, fume devant un panneau placé par al-Qaïda/Nosra, disant que fumer est haram.

Punition: il fut enlevé et traîné devant le tribunal selon la charia établi par al-Nosra, et qui était semblable à ceux de Daech. Ce tribunal le condamna à deux semaines de prison pour “manque de respect à l’islam”. Il publia ensuite sa photo avec un baillon devant un autre panneau. Je la publierai dans un autre article avec un commentaire spécifique.

Cette révolte personnelle contre la cigarette traduit la rivalité entre l’ASL et al-Nosra. La plupart des membres syriens de l’ASL ont été débauchés par al-Nosra qui, envoyée par Baghdadi former une branche syrienne de Daesh, proposa à ces djihadistes des paies plus importantes que celles qu’ils percevaient dans l’ASL. Al-Nosra fut ainsi formée au début, de ces dissidents de l’armée syrienne qui avaient accepté, au début de la révolution, de passer à al-Qaïda pour des soldes plus consistantes, payées par les pays du Golfe.

Souheil Hammoud faisait partie de ceux de l’ASL qui ne se sont pas laissés débaucher par al-Nosra durant toutes ces années. Il croyait que ses hauts faits militaires lui vaudraient l’impunité, pensant que l’opposition ne pouvait se passer de lui.

www.akhbaralaan.net/news/arab-world/2017/05/04/سهيل-أبو-التاو-من-صائد-دبابات-الأسد-إلى-سجون-هيئة-تحرير-الشام

Dans l’affaire du tabac, al-Nosra a poursuivi la même politique que Daech qui, non seulement interdisit le tabac, mais assembla tout ce qu’elle avait pu confisquer dans les commerces et les maisons, et… le brûla dans un grand feu… infligeant aux gens de fumer une énorme quantité de tabac à la fois, et… malgré eux.

Attention. Ce n’est pas parce que le tabac est nocif pour la santé qu’al-Nosra, dans ce panneau, le juge haram: al-Qaïda, dont elle fait partie, ne donne pas un sou pour l’opinion des médecins mécréants.

Mais Ibn Abdel-Wahhab, le cofondateur du royaume saoudien et le père du wahhabisme, l’avait dit. Et il fouettait ou tuait les délinquants.

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Décapitation de la statue du poète Aboulalaa al-Maarri

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Aboulalaa al-Maarri, poète syrien aveugle du Moyen Age, était athée. Il avait écrit un livre parodiant le Coran, et on l’avait estimé mécréant. Poète très célèbre, les enfants l’apprennent à l’école.

Le livre fut interdit par les autorités califales. Il disparut durant des siècles, pour réapparaître sous la forme d’un manuscrit poussiéreux dans un grenier. Il fut réédité, au grand dam des islamistes.

Le gouvernement syrien lui avait élevé une statue dans sa ville de Maarrat en-Noaman, entre Hama et Alep.

Durant la guerre, Nosra (financée par l’Arabie Saoudite et entraînée par les Américains) envahit Maarra et y massacra les chrétiens. Faute de pouvoir couper la tête d’Aboulalaa vivant, elle trancha celle de sa statue.

NB : Nosra, émanant de Daech, a pris les combattants de l’ASL en leur payant davantage. Voyez cette vidéo (sans craindre l’avertissement de Facebook: il est dû au fait que l’ASL a dû se plaindre des scènes que j’ai tirées de ses vidéos).

www.youtube.com/watch?v=bR0Vc568je0&bpctr=1551019218

Lina Murr Nehmé, 24 février 2019

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Vidéo : Syria Charity et ses connexions djihadistes

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Le président Macron connaît-il les relations de Syria Charity avec l’Armée Syrienne Libre (ASL) ? Sait-il que l’ASL est une milice djihadiste ? En Syrie, l’ASL dégoûte la population par ses exactions. En France, sa communication est assurée par Syria Charity et par Free Syria, qui lui permettent de récolter des fonds en lui donnant des airs présentables.

Cette vidéo montre les connexions de Syria Charity et de Free Syria avec l’ASL. Regardez-la jusqu’au bout : elle est dure, mais moins que les attentats qui frappent en utilisant, parfois, l’argent français.

Lina Murr Nehmé, 28 avril 2018

ADDENDUM : Youtube a décidé de restreindre l’accès à la vidéo. Si vous ne pouvez pas vous connecter pour confirmer vore âge, cliquez sur le lien Vimeo en-dessous.

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Vidéo : L’armée de l’islam met en cage les civils de Ghouta

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  Dans cette vidéo visible sur youtube (lien ci-dessus), j’analyse la mainmise, par l’organisation terroriste appelée “l’Armée de l’Islam” (Jaych al-Islam), sur Ghouta, près de Damas. L’Armée de l’Islam est financée par l’Arabie Saoudite et d’autres puissances. Elle a été aidée par l’Angleterre et la France à titre de “rebelles modérés”. Pourtant, elle jette les homosexuels du haut des immeubles. Elle enlève des centaines de civils parce qu’ils sont alaouites et elle les garde au secret durant trois ans. Puis elle les ressort dans des cages, les habille de neuf, les pomponne et rase les hommes à l’islamiste. C’est pour les promener dans Ghouta et les filmer en annonçant qu’ils seront mis sur les toits et qu’en cas de bombardements, ils mourront les premiers. Fait évidemment attesté à la fois par les djihadistes qui ont publié une vidéo, et par les habitants qui étaient témoins. Ce sont les plaintes de cette organisation qui ont provoqué les bombardements américain, britannique et français en Syrie en avril 2018, avant même une enquête internationale pour prouver que s’il y a eu des gaz toxiques utilisés à Ghouta, c’est le gouvernement syrien qui en est coupable. La démarche était d’autant plus illogique que l’armée syrienne avait alors pris la presque totalité de Ghouta et que l’Occident l’avait menacée d’une guerre terrible si elle recourait à cette arme.

 

Lina Murr Nehmé, 17 avril 2018

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Le site de Brad bombardé par les Turcs

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Pour illustrer mon livre Si Beyrouth parlait…, j’avais pris cette photo des ruines de la ville morte syrienne de Brad, trois mois avant le début de la guerre syrienne.

Tout récemment, l’aviation turque aurait endommagé ce site de première importance archéologique et religieuse, où se trouve également le tombeau de saint Maron, patron des maronites.

On parle peu des villes mortes de Syrie, dont certaines ont été endommagées par les bombardements. Ceux des Turcs aujourd’hui, et ceuxde leurs alliés depuis 2011. Ces alliés sont essentiellement des djihadistes, notamment l’ASL (Armée syrienne libre), rebuts de l’armée syrienne, et les premiers à avoir procédé à des égorgements devant caméra, et même, à avoir diffusé un acte de cannibalisme filmé.

L’ASL a constitué l’essentiel des effectifs d’al-Qaïda quand celle-ci est venue d’Irak en Syrie pour fonder la branche syrienne d’al-Qaïda appelée Nosra. Nosra est ainsi la fille de Daech.

L’ASL, Nosra, Daech et plusieurs autres organisations terroristes se sont battues entre elles ou contre l’armée syrienne (et souvent aussi contre les habitants) de la région des villes mortes, qui se situe en Syrie, à la frontière entre la Syrie et la Turquie.

On attend cependant la fin de la guerre pour savoir ce qu’il reste vraiment de ce précieux patrimoine archéologique datant des débuts du christianisme.

Lina Murr Nehmé, 26 mars 2018

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Qui sont les “rebelles syriens” de Ghouta ?

 

Le Jaych el-Islam est le principal groupe qui combat l’armée syrienne à partir de Ghouta. Fondé par un Frère Musulman, il a à son actif le viol, l’enlèvement ou le meurtre de milliers de Damascènes. Même si les médias officiels n’en parlent pas, il est facile de l’imaginer quand on écoute le discours (voir ci-dessous la vidéo de propagande avec traduction anglaise) du chef, s’adressant à une nouvelle promotion de “soldats de l’islam”. 

Le nom “Jaych al-Islam” signifie en effet “l’Armée de l’islam”. C’est un groupe djihadiste qui affirme avoir pour but de reprendre le travail de conquête de Mahomet et des premiers califes.
Les médias, trompés par des sources d’information biaisées, prétendent que le Jaych el-Islam et les autres formations qui combattent à Ghouta sont des “rebelles syriens” représentatifs de la population. Ce n’est pas le cas. Le Jaych al-Islam a plusieurs fois annoncé la venue de groupes venant de diverses régions du pays. À ces groupes peuvent s’ajouter les djihadistes venus des pays arabes et de l’Occident, voire même du Pakistan, de l’Inde et de la Chine.

Enfin, on ignore en Occident que nombre de miliciens en Orient ne sont que des mercenaires, souvent poussés par la faim. Sur ce plan, le versement d’argent par l’Arabie Saoudite et d’autres puissances pour l’extension de l’islam en Syrie, est la seule raison de l’existence d’une grande partie de ces milices, qui se débanderaient si cet argent cessait d’arriver. Quant aux effectifs du Jaych el-Islam, ils sont monstrueux, compte tenu de la petite taille de Ghouta face à une métropole comme Damas. Voici ce qu’on lit dans le journal “Le Monde” au sujet des trois armées — toutes djihadistes — dont le sort se joue en ce moment à Ghouta :

“L’enclave de la Ghouta est tenue par plusieurs groupes rebelles et djihadistes. Le plus puissant est Jaych Al-Islam (l’Armée de l’islam). Il s’agit d’un groupe salafiste soutenu par l’Arabie saoudite, dont le siège dans la Ghouta se trouve à Douma, la localité la plus importante de l’enclave. On estime ses effectifs à 10 000 hommes, disposant de blindés, de pièces d’artillerie et de mortiers.

“Le deuxième groupe en termes de taille et d’influence est Faylaq Al-Rahman, soutenu par la Turquie et le Qatar. Il compterait 8 000 hommes dans la Ghouta orientale. Les zones placées sous son contrôle, au centre de l’enclave, sont les plus touchées par les bombardements du régime.

“Ahrar Al-Cham, un groupe originellement d’inspiration djihadiste, a également un ancrage dans la Ghouta orientale. Hayat Tahrir Al-Cham, un groupe lié à la nébuleuse Al-Qaida, maintient par ailleurs une présence dans le territoire rebelle. Jaych Al-Islam et Faylaq Al-Rahman ont échoué à obtenir du régime l’arrêt des combats et la reconnaissance d’une forme d’autonomie locale en échange de l’expulsion de Hayat Tharir Al-Cham de la Ghouta orientale.”

Façon pudique de dire que le Hayat Tahrir Cham est spécifiquement l’alliance de Nosra (al-Qaïda-Syrie) et d’autres groupes moins importants et que Nosra domine.

Vidéo de propagande diffusée par le Jaych el-Islam, principal groupe qui combat l’armée syrienne à partir de Ghouta.

Lina Murr Nehmé, 22 mars 2018

Pillage d’Afrin par l’ASL et la Turquie

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Le pillage d’Afrin par les alliés d’al-Qaïda et de la Turquie: l’ASL (Armée Syrienne Libre). L’ASL, ce sont les déserteurs sunnites et islamistes qui refusaient le gouvernement alaouite. Ce sont eux qui, les premiers, ont diffusé des vidéos d’égorgements (de policiers syriens en l’occurrence) , et même, une vidéo dans laquelle un de leurs chefs pratiquait le cannibalisme, mangeant le cœur d’un soldat syrien en faisant crier “Allahou Akbar!” par ses hommes. Ce sont eux que l’Occident appelle “opposition modérée” et a financés et armés contre l’armée nationale qu’ils avaient désertée.

 

Quelques mois plus tard, ils obtenaient une fatwa leur ordonnant de faire le djihad, fatwa qu’ils exhibent toujours. Leur sincérité quand ils prétendaient avoir déserté par patriotisme, a été vite prouvée par le fait que la plupart d’entre eux ont déserté l’ASL parce qu’al-Qaïda, venue d’Irak fonder la branche syrienne al-Nosra, leur offrait davantage d’argent.

Les reporters occidentaux et orientaux ayant rapporté l’existence de ce pillage généralisé de la malheureuse ville syrienne tombée aux mains des Turcs, la direction de l’ASL s’est dépêchée de publier un communiqué interdisant le pillage……… mais le djihad n’implique-t-il pas le pillage des vaincus ? C’est la charia qui le stipule, ajoutant que les femmes et les enfants font partie du butin.

En l’occurrence, l’armée turque, qui donne tout de même les ordres, n’en est pas revenue au stade de barbarie de l’ancienne Turquie ottomane d’avant les Tanzimat, où le butin était la loi officielle, qu’on faisait sans se cacher — et qui est la loi de l’ASL, puisqu’elle a reçu une fatwa de faire le djihad, dans lequel le djihadiste sait que sa récompense sera soit le paradis, soit le butin.

Afrin, comme je l’ai expliqué précédemment, est une ville syrienne frontalière. En l’occupant, la Turquie en fait le clou qui empêche le raccordement des Kurdes de Turquie et de Syrie, la réalisation du Kurdistan, et qui auraient pu se réfugier en Syrie.

Contrairement à une légende répandue, les Kurdes, traditionnellement dans l’opposition, combattent avec le gouvernement syrien parce qu’ils ont, dès le début de la guerre de 2011, demandé et obtenu un nombre substantiel d’avantages, dont des promesses d’autonomie partielle. Les Kurdes d’Irak soutiennent leurs frères kurdes de Syrie, et le risque de voir les Kurdes raccorder le Kurdistan turc au Kurdistan syrien, était pour Erdogan un danger qui a justifié, à ses yeux, des massacres de Kurdes, non seulement près de la Syrie, mais dans d’autres régions de Turquie également. Et, plutôt que de perdre la partie kurde de Turquie, il a préféré envahir une ville syrienne.

(Photo publiée sur Twitter par la journaliste Jenan Moussa, célèbre pour ses reportages du côté des rebelles libyens et syriens.)

Lina Murr Nehmé, 21 mars 2018

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Y aura-t-il un nouvel Etat islamique en Syrie ?

Al-Nosra est la fille de Daech et ambitionne de remplacer Daech. Mais est-ce possible ? En 2016, Lina Murr Nehmé faisait à ce sujet à Michel Kik des réponses qui demeurent actuelles et qui poussent à réfléchir.

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Comment Daech s’est installé au Liban

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(Publié initialement le 24 hoût 2017)

Pour ceux qui ne comprennent pas ce que vient faire Daech au Liban, il y a maintenant exactement 3 ans qu’il s’y trouve dans le cadre de son invasion mondiale, qui devait naturellement commencer par Cham (Liban-Syrie-Israël-territoires palestiniens-Jordanie) avant de se poursuivre dans les autres pays, notamment par voie maritime, par le biais des ports du littoral syrien, libanais ou israélien, notamment : Lattaquié, Tripoli, Beyrouth, Sidon, Haïfa, Jaffa, pour arriver, plus au sud, à Eilat et au canal de Suez. Pour la même raison, Nosra, qui s’est attribué Cham, tentait une invasion du Liban et de la Jordanie.
Les deux organisations, toutes deux issues d’Al-Qaïda, se combattaient en Syrie, mais au Liban, elles étaient alliées.

L’invasion aurait dû être stoppée à la frontière libanaise. Mais à l’époque, les pressions saoudiennes, qatari et autres (bakchich notamment), sur le gouvernement et sur le commandant en chef de l’armée, Kahwaji (qui espérait devenir président de la République), ont poussé ce dernier à laisser précipitamment partir en Syrie les Daech et les Nosra qui se trouvaient dans la localité d’Ersal et les prairies voisines (Jouroud Ersal), alors, pourtant, que l’armée libanaise était victorieuse. Les islamistes avaient des otages, soldats et gendarmes libanais, et dans sa précipitation, Kahwaji les a laissés partir en négligeant de leur faire d’abord rendre les otages.

Durant les jours suivants, Daech et Nosra ont exigé la libération de tous les prisonniers islamistes dans les geôles libanaises, en menaçant d’exécuter les otages si le gouvernement libanais n’obtempérait pas. Ce qu’ils firent quelques jours plus tard, en prenant soin d’envoyer des vidéos ou des photos horribles pour faire chanter le gouvernement libanais.
Le premier martyr a été un soldat libanais sunnite appelé Ali Sayyed. Daech l’avait égorgé de la façon la plus horrible et avait fait circuler la vidéo au Liban.
Furieux, des jeunes gens sont allés brûler les drapeaux de Daech et Nosra sur la place la plus fréquentée de Beyrouth par les jeunes. Ils ont diffusé les photos sur les réseaux sociaux, mais elles n’ont circulé qu’entre leurs amis.

Quelques jours plus tard intervint le ministre de la Justice Achraf Rifi, alors un des plus puissants sunnites du Liban. Son nom était proposé pour devenir Premier ministre, et son soutien était essentiellement formé par les islamistes qui terrorisent la ville libanaise de Tripoli. Pensant se faire remarquer par les Etats souteneurs de Daech (alors l’Arabie et le Qatar) qui pouvaient l’amener au pouvoir, il annonça, le 30 août 2014, que puisque les phrases de la chahada islamique étaient inscrites sur les drapeaux de Daech et Nosra, il réclamait la prison et les plus grandes peines pour châtier les jeunes gens qui les avaient brûlés.

Capture d’écran 2017-12-31 à 19.09.29

Article de Libération : “Le ice bucket challenge détourné contre l’Etat islamique”

Article paru dans le quotidien égyptien Ahram

Le pays étant révolté par les concessions faites aux terroristes et par l’horreur de la mort d’Ali Sayyed, la déclaration de Rifi fut un comble.

Il aurait dû y avoir des dizaines de manifestations, il n’y en eut aucune. Il y avait à la fois un climat de révolte et de peur. Peur parce que Daech était à moins de 100 kilomètres de Beyrouth, et parce qu’il semblait tout puissant : il avançait à toute vitesse, et annonçait qu’il allait prendre Beyrouth. Et révolte parce que le pouvoir ne donnait pas à l’armée libanaise l’ordre de poursuivre la bataille, alors qu’elle le pouvait.

Je cherchai toute la journée à organiser une manifestation, sans succès. Alors j’ai pris sur Internet une photo d’un drapeau de Daech, je l’ai agrandie, imprimée et agrafée sur un manche à balai. Un inconnu me regardait curieusement du balcon d’en face, j’ai tiré les rideaux du balcon et j’ai collé un drapeau libanais dessus. Et j’ai commencé à brûler le drapeau agrafé en me faisant photographier, jusqu’à ce que le drapeau finisse de se consumer.

Puis j’ai mis une des photos sur Facebook. Je croyais que tout le monde mettrait, comme moi, sa photo brûlant le drapeau de Daech sur Facebook. Mais au lieu de cela, les gens partagèrent ma photo, et cela flamba à toute vitesse.

Le lendemain, tout le pays en parlait, on en parlait dans le monde entier, mais pas dans les grands médias libanais, qui avaient peur. Les journalistes en privé partageaient ma photo ou écrivaient sur des pages Internet. Mais dans les grands journaux, silence complet. Sauf dans les journaux de l’étranger : “Al-Ahram”, qui mit mon nom mais n’avait pas osé mettre ma photo, “Libération” qui publia ma photo mais pas mon nom, etc.
Un groupe de jeunes, dont des musulmans, décida d’aller brûler le drapeau devant le palais de Justice, mais pour une raison ou une autre, le drapeau fut échangé, à la dernière minute, par un faux sur lequel il était écrit: “Pas de dieu pour le terrorisme”. Et ils le brûlèrent en faisant une conférence de presse que tout le monde fut heureux de répercuter.
Les Occidentaux, qui ne lisent pas l’arabe, n’ont pas remarqué la supercherie, grâce à l’hypocrisie des médias libanais qui se sont précipités sur cette affaire pour compenser leur lâcheté face à la mienne.
Les islamistes, qui lisent l’arabe, ne s’y sont pas trompés et n’ont répercuté que ma photo. Le tweet suivant a été envoyé 11h après que j’aie publié ma photo, par un compte qui se donne le nom de « Services de renseignements de l’ASL » (Armée syrienne libre), page par la suite fermée par Twitter. La légende est une menace en soi :

« L’écrivain chrétienne Lina Murr Nehmé défie les musulmans au Liban et brûle l’étendard de l’islam. » Les deux premiers commentaires sont classiques : l’un me traite de « vieille sorcière », et l’autre dit :

« Elle a peut-être envie que sa photo fasse la Une des journaux du monde pendant qu’elle sera en train d’être égorgée. »

À signaler que l’ASL, que l’Occident a toujours appelée modérée, est une organisation formée du rebut de l’armée syrienne, les islamistes, ceux qui ont torturé ou massacré au Liban, et qui ont par la suite utilisé les mêmes méthodes en Syrie. Nosra s’est nourrie des éléments de l’ASL, qui a périclité et a d’ailleurs ouvertement montré par la suite son but véritable : le djihad armé. Cela n’empêche pas l’Occident de l’appeler modérée. Il est vrai que le régime wahhabite saoudien aussi est appelé modéré, même après avoir décapité des dizaines de personnes pour avoir manifesté.

Les islamistes ont écrit des centaines de fois sur les réseaux sociaux qu’ils allaient m’égorger. Je suis encore vivante, et ce que j’annonçais à l’époque dans mes articles et dans mes posts, se réalise: Daech n’est pas tout-puissant, et c’est pourquoi le fait de brûler le drapeau n’a pas créé de guerre civile (au contraire, il a uni), il a sauvé les jeunes gens de la prison, il a empêché quiconque de menacer notre liberté d’expression au nom de la religion. À ce jour, il n’a pas amené ma mort.

Donc, la lâcheté ne paie pas.

Ces événements (le retrait des terroristes avec les soldats libanais otages, la mort d’Ali Sayyed, les menaces envers les jeunes gens qui avaient brûlé les drapeaux de Daech et Nosra) qui se passaient il y a trois ans jour pour jour, ont laissé place à un paysage totalement différent. Le général Aoun, à l’époque était empêché d’arriver au pouvoir parce qu’il possède le plus gros bloc parlementaire chrétien, et qu’avec ses députés, il aurait été, contrairement à ses prédécesseurs nommés par l’ennemi, assez fort pour donner à l’armée libanaise l’ordre de chasser Daech et Nosra et de libérer Ersal.

Ceux qui ont financé Daech clament haut et fort que c’est le Hezbollah qui dirige les opérations, les uns pour glorifier le Hezbollah, les autres pour avilir l’armée libanaise comme ils ont toujours fait.

En fait, le Hezbollah n’a pas attaqué Nosra à Ersal au Liban de sa propre initiative, mais seulement, quand il a su qu’une opération avait été décidée par l’armée libanaise sur ordre du gouvernement. Car c’est la première fois depuis l’occupation syrienne du ministère de la Défense (1990), que le commandant en chef de l’armée n’est pas choisi par les ennemis du Liban. C’est quand le commandement de l’armée a changé qu’il a été possible d’envisager une libération totale du Liban, et non quand le Hezbollah l’a voulu. En trois ans, ce dernier n’a jamais osé faire ce mouvement vers Ersal. Il est exclusivement chiite, et il a besoin du soutien des autres communautés, que représente l’armée libanaise. C’est elle qui commande au Liban sur le plan militaire, même si ce n’est pas elle qu’on voit. Et cela a toujours été le cas. Elle est la seule institution dans laquelle la majorité des Libanais de toutes confessions se sentent représentés. Elle ne se donne pas le nom de chrétienne ou musulmane, comme font les milices. Elle est nationale et multiconfessionnelle, mais de discipline et de comportement laïques.
Les milices confessionnelles passent, l’armée libanaise reste. C’est la seule armée qui n’a jamais été vaincue, même par les Israéliens. C’est aussi la seule qui n’a jamais pris les territoires d’autrui. Ce n’est pas parce qu’elle ne l’a pas pu : elle seule, en 1948, a occupé des territoires israéliens : la Galilée durant 6 mois. Puis elle s’en est retirée sans être chassée, mais en signant un armistice.

Je pense que si l’armée libanaise perdait son éthique, elle perdrait aussi des batailles. En 2007, c’est sa victoire qui a empêché que l’Etat islamique ne commence au Liban. A l’époque, les terroristes du Fatah-el-Islam avaient égorgé et éborgné 20 soldats libanais dont un officier, dans leur sommeil. Au lieu de rendre la pareille, l’armée libanaise (contre la volonté du gouvernement qui protégeait alors les islamistes) a mis le siège autour du camp de Nahr el Bared, QG du Fatah-el-Islam, et pendant une semaine, a utilisé ses véhicules militaires pour évacuer les civils de l’ennemi sous sa protection, non pour les prendre en otages, mais pour les libérer et leur éviter la mort. Cette opération de sauvetage des civils de l’ennemi a coûté à l’armée libanaise deux morts de plus.

A signaler que l’armée libanaise est la seule institution non-confessionnelle au Liban, totalement laïque, où il est interdit de prier ouvertement, où il est interdit d’avoir une barbe islamiste ou un signe religieux comme un crucifix, alors, pourtant, que c’est l’institution où, probablement, dans leur cœur, les hommes prient le plus. Mais chacun dans son cœur. C’est la seule institution qui n’a pas pu être brisée. La seule qui représente tous les Libanais, et qui est toujours la cible des ennemis du Liban, quelle que soit leur nationalité et quelle que soit leur confession.

Pour sauvegarder ces principes de liberté morale et d’humanité, il y a eu les sacrifices de chrétiens, chiites, sunnites, druzes, alaouites, chacun frappé par des milices de sa propre communauté, mais debout moralement, même quand ils tombaient. Car ils tombaient pour que vive le Liban de Fakhreddine, celui dans lequel ce n’est pas la terreur, le bakchich et le clientélisme, mais l’amour entre les confessions qui fait l’unité nationale.

Nous, Libanais, nous nous aimons au-delà des différences. Ceux qui ne rentrent pas dans cette définition, ne sont pas libanais. J’espère qu’ils le deviendront, car plus on est nombreux avec cet état d’esprit, plus on est heureux. Sinon, ce n’est pas à eux qu’appartient l’avenir.
Ceux qui, les voyant si puissants, se mettent à désespérer, devraient se rappeler le proverbe qui dit: “Il y a un jour pour toi, ô injuste.” Et: “Celui qui creuse une fosse pour son frère, tombera dedans.”

J’aurais le même message à transmettre à ceux qui désespèrent de mon autre pays, la France, qui ne peut être sauvée que par l’amour. Et qui le sera.

 

Lina Murr Nehmé

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