Archives de catégorie : Djihad

Silence, on viole

Les Blancs au Soudan sont les descendants des Arabes venus d’Arabie, qui prenaient les Noirs en esclavage au VIIe siècle et ont donné leur nom de Soudan (Soud) au pays. Les voyageurs du XIXe siècle font des descriptions terribles du traitement que faisaient ces marchands d’esclaves, et les gravures d’époque ne font que les confirmer.

La lecture de ces textes produit une impression si dure qu’elle ne vous quitte pas de toute votre vie si, comme moi, vous avez passé des mois ou des années à les étudier, à les confronter avec d’autres textes anciens, et à les traduire.

A condition, bien sûr, de ne pas être un crocodile. Moi, en tout cas, ce travail ne m’a pas laissée indemne, et je ne comprends pas, mais vraiment pas, comment il est possible aux historiens de lire, d’étudier ces horreurs, sans en être écorchés pour la vie.

Car les historiens mainstream connaissent ces textes. Certains d’entre eux les citent. Froidement. Puis ils passent outre. Ils racontent ainsi que le fameux “baqt” (pactum?) imposé par les Arabes consistait, pour les Nubiens, à payer “en nature”, avec leurs enfants, la jizya qui leur donnait droit à continuer à pratiquer leur religion sans mourir, et qu’ils n’étaient pas assez riches pour payer avec de l’or.

Mais les Soudanais, les Nubiens et les Nord-Africains n’étaient ni les seuls, ni les premiers à subir ce genre de racket. Bien d’autres l’ont subi de la main des premiers djihadistes dont les djihadistes d’aujourd’hui se font la fierté d’imiter. Dès les premières années de l’islam. Les pays aujourd’hui appelés Azerbaidjan, Arménie, Daguestan, Afghanistan, Géorgie, Pakistan, Inde, etc., avaient résisté à l’islam, et s’étaient accrochés à leurs religions respectives. Mais ce genre de racket, plus des massacres de temps en temps, et tout finit par changer. Les ravisseurs djihadistes poussaient la cruauté jusqu’à exiger, par exemple, que les enfants livrés par ces nations aient “les sourcils noirs et les yeux noirs”, qu’ils soient beaux, et bien sûr, bien formés. Ce qui poussait certaines mères pour épargner le viol à leurs filles ou la honte à leurs fils, à les mutiler.

Le sous-continent indien (aujourd’hui l’Inde, le Pakistan, le Sri Lanka, le Bengladesh), a été particulièrement ensanglanté par ces méthodes. Il arrivait, si l’on en croit les chroniqueurs, que deux cents mille Indiens soient massacrés par les djihadistes pour avoir refusé de changer de religion. Après les batailles, ils prenaient les femmes et les enfants, leur arrachaient les vêtements et les envoyaient, nus jusqu’à la ceinture et sous les cuisses, marcher dans la neige des montagnes séparant le Pakistan et l’Afghanistan. Ils y mouraient de froid, en si grand nombre que ces montagnes furent appelées Hindou Kouch (mort des Hindous). Soit dit en passant, c’est là la raison pour laquelle ils ne tuaient pas les femmes et les enfants à la guerre: parce qu’ils étaient pour les djihadistes une marchandise qui rapportait.

Cette tragédie poursuit au #Soudan, et parfois en Afrique du Nord (#Libye, etc.) sous nos yeux, quand de pauvres Africains rêvant d’argent facile à Paris se retrouvent sous le fouet des esclavagistes en Libye ou en Algérie. N’oublions pas la Tchétchénie et le Levant sous Daesh, qu’une femme politicienne ose proposer d’acheter pour permettre au mari de coucher avec d’autres femmes sans être adultère selon la charia (Voir les textes que j’ai traduits sur l’esclavage d’après cette femme et la charia dans “L’Islamisme et les Femmes”.)

Oui, tuer, violer, vendre le Noir, le Jaune, le Brun ou le Blanc fait partie du #djihad, et se pratique aujourd’hui encore. Mais presque personne ne daigne en parler. Car si Daesh a repris ce racket humain au Levant pour un temps, on voit d’innombrables d’organisations djihadistes enlever des Noirs pour la vente. Les pays du Golfe ont toujours été de gros acheteurs, mais chut ! il ne faut, paraît-il, pas le dire.

Oui, tout se fait dans le silence pour ne pas gêner les acheteurs de contrats d’armes et les vendeurs de pétrole, d’or, de diamants et autres matières premières indispensables à fabriquer les batteries, les téléphones et les ordinateurs portables, et j’en passe.

De temps en temps, il y a un reportage; mais combien le voient? Combien s’en souviennent ? Qui agit? Pas les chefs d’Etat qui veulent être réélus, car le pétrole et les matières premières sont de l’autre côté de la balance.

Honte à l’humanité.

Écrit à Beyrouth par Lina Murr Nehmé, le 7 novembre 2023

Le Fatah-el-Islam et la bataille de Nahr el-Bared

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

En 2006, dans un camp palestinien au Nord-Liban, le Nahr-el-Bared, l’organisation Fatah-el-Islam fit scission du groupe Fatah-el-Intifada, qui avait lui-même fait scission du Fatah de Yasser Arafat en 1983.

Le Fatah-el-Islam était une organisation palestinienne de type al-Qaïda ou Daesh, et comme elles, elle recrutait des djihadistes de partout et grandissait à toute vitesse. Son but déclaré était de libérer Jérusalem par l’islam, et en vue de faire le djihad contre Israël et le Liban, elle avait constitué un noyau d’État islamique, et appelait son chef émir, c’et-à-dire “commandeur”.

Les Américains et les Saoudiens étaient revenus à la même stratégie employée au temps d’Oussama Ben Laden : financer et aider des moudjahidine islamistes, dans le but de faire une guerre par proxy. En l’occurrence, ils voulaient les utiliser contre le Hezbollah. Ils aidaient et finançaient le Fatah-el-Islam, par l’intermédiaire de certains membres du gouvernement de Siniora. C’est du moins ce que dit un des ministres de ce gouvernement au journaliste Seymour Hersh.

L’argent venant à manquer, le Fatah-el-Islam braqua une banque et se servit. Les services de Sécurité intérieure, alors dirigés par le général Achraf Rifi, firent une descente dans un appartement d’une rue cossue de Tripoli, et arrêtèrent des membres du Fatah-el-Islam.

L’armée libanaise n’en fut pas informée, et elle ne prit pas de mesures spéciales. Le 20 mai, le Fatah-el-Islam égorgea dans leur sommeil vingt soldats libanais, dont un officier; certains d’entre eux furent éborgnés.

Le Premier ministre Siniora, qui soutenait le Fatah el-Islam, ne voulait pas que l’armée libanaise attaque le camp de Nahr el-Bared. Mais l’armée alla camper autour de ce camp, et mit une semaine à en évacuer les civils, même ceux de l’ennemi. Elle eut deux morts et plusieurs blessés. Les Palestiniens eurent encore plus de morts dans l’opération, car les terroristes tiraient sur eux davantage que sur les Libanais.

La bataille fut très longue et très difficile avec, chaque jour, des révélations d’épouvante. Trois mois plus tard, le 3 septembre, les soldats rentrèrent après avoir perdu cent soixante-huit compagnons dans la bataille. Et Israël put se réjouir, parce que si l’armée libanaise n’avait pas gagné cette bataille, le Fatah-el-Islam aurait rapidement été dans tout le Liban, et combattant à la frontière d’Israël.

Après tant d’angoisse, les soldats libanais reçurent de la population de ville en ville, et même sur l’autoroute, un accueil tel… qu’ils mirent plus de dix heures à traverser les 84 km qui séparent Tripoli de Beyrouth.

Lina Murr Nehmé, 3 septembre 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Le tueur de Villeurbanne (vidéo)

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

L’article, pour rappel :

Le samedi 31 août 2019, à Villeurbanne, un Afghan frappe une dizaine de personnes devant un arrêt de bus. Il a un pic à barbecue et un grand couteau. Un barbu parvient à l’amadouer en lui disant quelques mots, et il lui serre la main. 

Arrêté, il se présente à la police avec deux identités différentes, et trois dates de naissance. Malgré cela, il paraît que cet Afghan a obtenu une carte de séjour en France. D’après ce qu’il a dit aux enquêteurs après la tuerie, il s’appelle Sultan Marmed Niazi, et il est né en 1986 en Afghanistan.

Il avait donc dix ans lorsque les Talibans ont pris l’Afghanistan, et il a subi leur éducation religieuse obligatoire durant six ans au minimum : de 1996 à 2001 inclus. En fait, il a subi cette éducation bien plus longtemps, car il est un Pashtoune. Les Pashtounes sont une ethnie qui peuple les montagnes à la frontière entre l’Afghanistan et le Pakistan. Les Talibans afghans, et notamment leur chef, le mollah Omar, sont des Pashtounes, et ce sont eux qui ont fait de l’Afghanistan un sanctuaire pour al-Qaïda. Ils imposent leur enseignement islamiste sur tout le territoire afghan depuis 1996, mais ils l’ont imposé dès 1994 dans leur territoire. Et après la guerre conduite par les Américains en Afghanistan qui a suivi les attentats du 11 septembre 2001, les talibans ont gardé une certaine force dans leurs montagnes, notamment grâce aux talibans pakistanais. De toute façon, l’enseignement dans les madrassas, qui est souvent financé par l’Arabie Saoudite, n’a pas changé. 

Quoi qu’il en soit, Sultan Marmed Niazi a subi l’influence des Talibans durant sa jeunesse — les années où il était le plus fragile. Il a appris que les femmes ne doivent pas sortir, sans quoi il faut les battre ou leur jeter de l’acide. Il a appris que les hommes doivent porter la barbe, sans quoi ils sont mécréants. Il a appris que si un musulman ne fait pas ses cinq prières, il faut le tuer. Il a appris que si n’importe qui critique Allah, Mahomet ou le Coran, il faut le tuer. Il a appris que si on critique la décision de tuer un blasphémateur, ou si on critique les terroristes qui ont commis la tuerie de Charlie Hebdo, on est un ennemi d’Allah et on doit mourir.

Par ailleurs, Niazi ne se sent pas un bon croyant. Ça le tarabuste. Il a dit aux enquêteurs qu’il était anxieux à l’idée de ne pas bien suivre sa religion. Que faites-vous quand vous êtes anxieux ? Vous sortez, vous donnez un coup de fil, vous voyez quelqu’un, ou vous pillez votre réfrigérateur et vous grossissez. 

Et si c’est votre religion qui vous rend anxieux, vous irez probablement satisfaire votre conscience en faisant des actes de charité : vous faites une aumône, vous nourrissez un clochard, vous aidez une vieille femme embarrassée dans ses paquets, ou autre chose.

Mais Niazi ne peut pas soulager son angoisse religieuse en faisant des actes de charité. Les talibans lui ont appris que si le djihad a été déclaré, la première des bonnes actions, c’est de nettoyer la terre des mécréants pour faire régner l’islam. Or Oussama Ben Laden a promulgué une fatwa disant de tuer les chrétiens et les juifs dans le cadre du djihad. Et cette fatwa est suivie par les talibans. Donc Sultan Marmed Niazi sent qu’il doit tuer les blasphémateurs et les athées. Au foyer dans lequel il vit, il frappe justement ses compagnons réfugiés avec des chaises. Mais ce jour-là, il décide de tuer dans la rue, là où il y a des mécréants. 
Il explique ses raisons en disant aux enquêteurs qu’il a « entendu dans l’après-midi des voix insulter Dieu et lui donnant l’ordre de tuer ». Les psychologues qui l’ont examiné en ont conclu qu’il était dans « un état psychotique envahissant avec délires paranoïdes à thématiques multiples dont celles du mysticisme et de la religion ». 

Il y a pourtant bien eu, en France, des gens qui ont tué parce qu’ils avaient pris du cannabis. Ils n’ont pas crié « Allahou Akbar ». Ils n’ont pas dit que les gens qu’ils tuaient ne lisaient pas le Coran. Ils ne s’étaient pas dits investis par la divinité pour tuer des blasphémateurs.
Les enquêteurs ne se rendent peut-être pas compte qu’à force de haïr les mécréants, un homme éduqué par les Talibans peut vivre dans une telle tension nerveuse en France, qu’il en arrive à la paranoïa. Si un pupille des Talibans vit en France, il trouvera tout blasphématoire. 
Ensuite, quelle est la nature de ces voix entendues par Niazi ? Ce ne sont pas nécessairement des voix éthérées venant de l’au-delà. Ou alors, elles parlent de façon étonnamment semblable aux voix terrestres. Niazi a déjà tellement menti au sujet de son identité et de son âge, qu’on n’est pas obligé de le prendre au mot et de croire qu’il a des troubles psychologiques parce qu’il parle de voix. En tout cas, les voix qui insultent Allah peuvent très bien avoir été entendues par la fenêtre, dans la rue, à la télévision, ou sur les réseaux sociaux. 

Pour un homme éduqué par les talibans, le simple fait de défendre la laïcité ou l’acquittement d’Asia Bibi, ou encore, les victimes de la tuerie de Charlie Hebdo, est une insulte à Allah. On lui a enseigné qu’on est blasphémateur si on critique la loi anti-blasphème, car cela revient à critiquer la charia. La personne qui le fait doit donc mourir. De là à raconter aux inspecteurs qu’une voix lui a dit de tuer, comme le fait Niazi, pourquoi pas ? La voix qui lui a dit de tuer peut très bien être celle d’un ouléma qu’il a entendu prêcher dans une vidéo, ou dans une mosquée. Il y en a tellement, de ce genre de voix. Et lui, Afghan pachtoune, comprend les langues dans lesquelles ce genre de sermons sont le plus souvent prononcés et enregistrés.
En tout cas, il y a eu la mort d’un jeune homme. Quand l’Administration impose aux Français des réfugiés éduqués par les Talibans, elle a la responsabilité de les surveiller pour s’assurer qu’ils ne viendront pas mettre en pratique, en France, ce que leur ont appris les Talibans en Afghanistan, quand ils étaient petits. 

Parler de troubles psychotiques permet à l’Administration de camoufler sa négligence. Il est bien facile de mettre une tuerie sur le dos de la maladie. Ainsi, on ne parle plus de radicalisation. Mais alors, que dire des frères Kouachi, les assassins de Charlie Hebdo ? Que dire de Coulibaly ? Ils ont fait la même chose que Sultan Marmed Niazi, et ils n’étaient pas psychotiques pour autant. Mais ils avaient quelque chose en commun avec Niazi : ils avaient lu les mêmes livres que lui, et écouté les mêmes sermons, les mêmes « voix » que lui.

Lina Murr Nehmé

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

De quelle colonisation de l’Algérie parlons-nous?

De quelle colonisation parlons-nous?

Le 15 février 2017, Emmanuel Macron crut bon d’appuyer sa candidature à la Présidence de la République française, en allant déclarer, en Algérie, que la colonisation française était un crime contre l’humanité.

Comme je venais, le même mois, de sortir “Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur: ce qu’ils cachent”, j’étais encore plongée, et dans l’histoire de l’Algérie, et dans les crimes contre l’humanité qui y ont été commis. J’ai donc écrit cette lettre à M. Macron qui, ayant l’âge de mon fils, pouvait être excusé de ne pas connaître les réalités historiques.

Un ami l’a alors réalisée en vidéo (lien ci-dessous). Mais la campagne électorale est devenue si sale, et on a tellement parlé de la colonisation française dans un but électoral totalement éloigné de la réalité, que j’ai décidé de me retirer du débat, et de mettre la vidéo au tiroir. Temporairement. Car je savais que je ressortirais cette vidéo, convaincue que j’étais qu’on ne cesserait pas de parler de la colonisation, et qu’il faudrait clarifier ce terme (et ce qu’il cache) une fois les passions de la campagne électorale calmées, et avant que ne se déchaînent de nouvelles passions à l’occasion d’une autre campagne électorale.

D’autre part, l’Algérie a été soumise depuis l’indépendance à des pressions islamistes pour des raisons financières: l’Etat qui donne de l’argent, est aussi celui qui donne des ordres. J’avais parlé de cette islamisation et de ses résultats dans “Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur: ce qu’ils cachent”. Ce que j’ignorais, c’est le degré de refus d’une grande partie des Algériens, notamment jeunes, face à la désinformation dont ils ont été victimes à l’école et dans les manuels scolaires.

C’est pour eux que je publie la vidéo aujourd’hui, pour eux qui osent reparler de leur passé pour faire éclater la vérité au grand jour. Il est temps de rappeler les crimes contre l’humanité au Maghreb et à l’Ifriqiya entre les VIIe et XVIIIe siècles. Ceux qui les ont commis se moquaient bien de la politique française qui se ferait, treize siècles plus tard, et ils se moquaient certainement de nous tous, mécréants, et des élections qui mettraient Emmanuel Macron et Marine Le Pen face à face en 2017.

Il s’agissait d’un génocide culturel total, auquel ont survécu ceux qui, retranchés dans leurs montagnes-forteresses, se sont accrochés à leurs traditions et à leur droit communal.

Les Berbères, dans leur doit coutumier, respectaient beaucoup la femme, par exemple. Ce n’est pas ce que nous avons vu pratiquer en Algérie depuis le départ des Français, de la part du gouvernement qui a tenté d’écraser la culture ancestrale berbère au profit de l’arabisme.

Je ressors donc cette vidéo. Nous la dédions aux Algériens qui, durant les années 1990, ont revécu une partie du cauchemar qu’ont connu leurs ancêtres, du VIIIe siècle au XVIIIe inclus.

Lina Murr Nehmé

Lien de la vidéo:

https://youtu.be/LEH459JKz1w

Texte de la lettre ouverte écrite à Emmanuel Macron en février 2017 :

Je comprends, monsieur Macron, que vous alliez accabler la France à l’étranger. Quand on ne dispose pas d’assez de voix pour les prochaines élections, il faut bien mendier le vote de ceux qui veulent rester étrangers en France. C’est pourquoi vous avez calomnié la France en disant que sa colonisation de l’Algérie était un crime contre l’humanité.

On voit que vous ne savez pas de quoi
vous parlez. Je ne puis raconter ici les faits, ma lettre serait trop longue et
vous ne la liriez pas. Je vous renvoie donc à mon livre Tariq Ramadan, Tareq
Oubrou, Dalil Boubakeur : ce qu’ils cachent[1]
. Sachez seulement
que dès le début de la colonisation française, c’est une guerre de djihad qui a
été déclarée à Oran et non une résistance. Les djihadistes coupaient les têtes
des Français et des Algériens qui ne se soumettaient pas à eux. Ils les
accrochaient aux arçons des selles de leurs chevaux et ils caracolaient avec
ces trophées sanglants qu’ils exposaient sur des piques à l’entrée de leur
camp.

Vous me direz que ces djihadistes
défendaient leur pays, tout comme vous avez dit que les djihadistes de Syrie
défendaient le leur, alors que vous saviez qu’ils opprimaient les populations.
Comme eux, les djihadistes algériens se vantaient d’être des Arabes et ils
méprisaient la majorité algérienne qui était kabyle. Ils avaient livré
l’Algérie au sultan du Maroc parce qu’il était arabe lui aussi. Et en son nom,
ils avaient entrepris de transformer l’Algérie en État islamique.

Beaucoup d’Algériens subissaient ces
djihadistes, et ils les combattaient quand ils le pouvaient. Ils refusaient
qu’on leur impose l’identité arabe à la place de l’identité de leurs pères, la
langue arabe à la place du berbère, et la charia à la place de leur droit
coutumier qui respecte la femme. Et quels qu’aient été les torts de certains
Français, l’actif est si important que les Algériens qui aimaient les Français
ont toujours représenté une grande partie de la population, malgré toutes les
pressions : propagande, bakchich, menaces… Sans cela, les Français
auraient été vaincus depuis longtemps vu leur petit nombre et l’immensité de ce
pays montagneux. Mais il y a un parti pris dans la manière dont les harkis et
les pied-noir sont perçus. On dit du mal d’eux pour justifier le mal qu’on leur
fait.

Le Maghreb avait autrefois une
civilisation florissante, une civilisation multimillénaire. C’est la
colonisation arabe qui l’a détruite. Les Arabes ont tué les hommes, violé les
femmes, vandalisé les monuments, les peintures, les sculptures, les
bibliothèques et les églises de Libye, d’Algérie, du Maroc, de Tunisie. Cela,
ce n’est pas moi qui le dis, ce sont leurs chroniqueurs. Lisez leurs textes
traduits dans mon livre. Ils nous montrent des monstres face auxquels les
djihadistes modernes ressemblent à des enfants de chœur.

Ces colonisateurs arabes avaient imposé
aux Maghrébins qui refusaient de changer de religion, une amende religieuse
appelée jizya. Cette jizya était si forte qu’ils ne pouvaient la payer. Les
Arabes leur avaient alors dit de payer en nature : 360 enfants par an et
par région. Les années arabes sont lunaires : 355 jours. Chaque région devait
donc payer plus d’un de ses enfants par jour pour prix de sa religion. Et vous
imaginez les cris des mères auxquelles on arrachait leurs enfants, et les massacres
qui s’ensuivaient, car les pères défendaient les enfants…

C’est cette méthode qui a changé la
religion de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. C’est cette méthode qui a
moralement fait des Maghrébins des esclaves en les obligeant à abandonner leur
foi pour adopter celle de leurs ennemis.

C’est cette méthode que la France n’a
utilisée ni en Algérie, ni ailleurs. Il est vrai qu’elle a commis des crimes
bien plus grands que vous devez absolument dénoncer : elle a financé en
Algérie des hôpitaux, des écoles, des routes, des ponts, des installations
pétrolières. C’est vrai, monsieur Macron, construire des hôpitaux est considéré
comme un crime très grave, un crime contre l’humanité. Plus grave encore :
la France avait respecté la religion des Algériens au point de financer des
écoles coraniques en Algérie, et d’interdire aux missionnaires chrétiens de
critiquer l’islam. C’est cela qui pour vous est un crime contre l’humanité,
j’imagine.

Mais comment parler d’hôpitaux, de
routes et d’écoles, quand la pensée des enfants et des adolescents maghrébins
arrachés à leurs parents par les Arabes, hante et torture, quand leurs cris
résonnent aux oreilles, lancinants et terribles ? La souffrance des
centaines de milliers de petites filles maghrébines violées pour que l’islam puisse
coloniser le Maghreb vous glace-t-elle le sang, monsieur Macron ? Que
diriez-vous, que feriez-vous si on vous réclamait vos enfants pour en faire des
esclaves parce que vous auriez refusé de devenir musulman ? Que
feriez-vous si on faisait de votre fille une bonne gratuite le jour, et une
prostituée gratuite la nuit ?

Mais si vous disiez la vérité, vous ne gagneriez pas les voix de
l’électorat qui, en France, se réclame des colonisateurs arabes… et vous
n’auriez aucune chance de gagner les élections. C’est pourquoi je ne pense pas
que vous réparerez vos torts envers notre pays. Vous y perdriez beaucoup trop
de voix et vous seriez privé du plaisir de voir flotter, pour célébrer votre
élection sur la place de la Bastille, les drapeaux algérien et turc. Avec, en
bonus, ceux des djihadistes du Jaych el-Horr syrien, dont les hommes
égorgeaient des policiers dans la rue dès le début de la guerre de Syrie, et
plus tard, mangeaient des cœurs humains devant la caméra.


[1] Salvator, 2017.

Fascisme du deux poids, deux mesures

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Tags sur un mur de la mosquée de Toul. Les condamnations ont été unanimes. Les pierres et les provocations qui ont visé le prêtre et l’église de la paroisse toute proche n’ont en revanche déclenché aucune réprobation.

Il est devenu routinier de se focaliser sur un seul attentat, taisant des centaines d’autres. Il y a quelques années, en France, ces tags sur un mur d’enceinte de mosquée à Toul (voir photo ci-dessus), ont davantage scandalisé que la lapidation, à deux cents mètres de là, d’un prêtre et de son église (appelés “caillassage” alors que des parpaings avaient été lancés dans l’appartement du prêtre pendant qu’il s’y trouvait), et le drapeau noir islamique hissé sur cette église. Une semaine après les tags, on parla à peine de l’assassinat d’un jeune Français Noir et chrétien qui avait accouru au secours d’un autre Français qui défendait son amie insultée. (Lire les trois histoires dans mon livre L’Islamisme et les femmes.)

L’Islamisme et les femmes, Salvator, 2017.

Ce “deux
poids deux mesures” se fait soit selon l’identité du tueur ou du
délinquant, soit selon celle de la victime. Il y a quelque chose de
maladif dans cette sélection. C’est comme si l’on voulait priver une
personne de sa valeur humaine en fonction de sa religion, et interdire
de la comptabiliser parmi les victimes, si elle est attaquée ou tuée.

C’est là que se trouve le véritable fascisme de nos jours, car cette partialité dans l’information imite strictement ce qu’on faisait en Allemagne hitlérienne.

Lina Murr Nehmé, 24 mars 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Annonciation et “prières islamo-chrétiennes”

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Une partie du djihad consiste, après avoir dépouillé les chrétiens de
leurs pouvoirs, à les dépouiller aussi de leur histoire et de leur
religion. Cela s’est vu partout, et tout au long de l’histoire, quand on
dit, par exemple, que Jésus est un prophète musulman.

Je peux
croire en la bonne foi du musulman du peuple, qui ne connaît pas ses
textes — et en la bonne foi des chrétiens qui ne les connaissent pas non
plus. Je ne peux pas croire en celle des oulémas qui ont travaillé à la
transformation de la fête chrétienne de l’Annonciation, en fête
islamo-chrétienne. Car eux savent très bien ce qu’ils font.

Durant ces prières communes qu’ils ont organisées aujourd’hui dans un
grand nombre d’églises au Liban et ailleurs, pourquoi se sont-ils
empêchés de réciter les versets suivants au sujet de Jésus et Marie? Car
ils les récitent bien dans leurs mosquées, et ils montrent que pour
eux, le 25 mars n’est pas, comme disent les chrétiens, “l’anniversaire
du jour où Dieu est devenu un homme pour sauver les autres hommes en
portant leurs péchés et en priant et pardonnant sur la croix.”

Il y a dans cette omission quelque chose d’inquiétant. Car aujourd’hui,
ça va, les chrétiens sont en position de force au Liban: ce sont les
lieux de pèlerinage chrétiens qui sont les fréquentés, non ceux des
musulmans. Qu’arrivera-t-il, en revanche, quand les chrétiens seront au
creux de la vague comme durant les années 1990? A ce moment, il y a de
fortes chances pour qu’on continue à nous dire que l’Annonciation est
une fête commune, et qu’on ressorte alors les versets suivants qu’on
omet maintenant de signaler:

1- Les versets qui disent que Jésus n’est pas le Sauveur des hommes et qu’il n’est pas mort sur la croix:

« Ils ne l’avaient pas tué et ils ne l’avaient pas crucifié, mais il leur a seulement semblé qu’ils le faisaient. Et certainement, ceux qui pensent autrement restent dans le doute. Ils n’ont pas de science à ce sujet, mais suivent seulement des conjectures : ce qui est sûr, c’est qu’ils ne l’ont pas tué.» (Coran, 4.157-158)

2- Les versets qui disent que Jésus n’est pas la seconde personne de la Trinité, que Jésus n’est pas Dieu, et que les chrétiens sont des mécréants parce qu’ils y croient:

« Ils sont des mécréants, ceux qui disent : “Dieu est le Christ, fils de Marie !”… Ils sont des mécréants, ceux qui disent : “Dieu est le troisième de trois,” quand il n’y a, en matière de divinité, qu’un seul Dieu ! » (Coran, 5.72-73)

3- Les versets qui disent que l’annonciation de Jésus n’est pas l’annonciation de l’Incarnation de Dieu (selon les chrétiens), mais celle de la conception de l’annonciateur de Mahomet (selon les musulmans):

« Jésus, fils de Marie, a dit : “Ô fils d’Israël ! Je suis, en vérité, l’Apôtre [ou prophète] d’Allah, envoyé pour confirmer la partie de la Thora que vous avez déjà, et pour annoncer la bonne nouvelle d’un Apôtre qui viendra après moi et dont le nom sera : Ahmed”. Mais quand il vint à eux avec les preuves évidentes [les miracles], ils dirent : “Voilà une sorcellerie évidente.” » (Coran, 61.6.)

Messieurs les oulémas, c’est votre opinion, et nous la respectons: nous sommes au pays de la liberté d’opinion. Mais de grâce, respectez-nous en nous citant aussi les versets ci-dessus. Car ils montrent que nous ne parlons pas du tout de la même chose. Et que vous le savez.

Lina Murr Nehmé, 25 mars 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Sarah Halimi : L’assassin et les textes

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Sarah Halimi, retraitée juive, a été assassinée en 2017 par son
voisin Kobili Traoré qui récitait le Coran et des «Allahou Akbar». Au
début, silence complet sur l’acte terroriste: l’assassin est prétendu
irresponsable au moment du crime.

Sarah Halimi était femme et
perçue comme étrangère par ses voisins musulmans, à cause de la
propagande qui se diffusait dans la mosquée voisine. 40 pages de mon
livre L’islamisme et les Femmes parlent de cette mosquée, de ses tenants, de son influence
sur le quartier, de Kobili Traoré, de ce qu’il avait appris dans cette
mosquée et dans les sermons et entretiens des tablighis qui la tenaient;
et enfin, décrivent le meurtre et expliquent le sens religieux des
paroles de Kobili Traoré au regard de l’enseignement qu’il avait reçu;
la croyance au djinn, à la roqya, opération violente d’expulsion du
djinn, etc., l’assassinat de Sarah Halimi ressemblant à une roqya. Et
enfin, comprendre ses paroles à la lumière des textes qu’il révérait,
notamment dans leurs passages concernant les juifs.

S’être donnée tant de mal, et apprendre, pour finir, que c’est pour
rien, et que Kobili Traoré pourrait être déclaré pénalement
irresponsable?

Non seulement c’est une injustice (car si Sarah
Halimi avait été une musulmane tuée par un juif au son de phrases du
Talmud, il n’y aurait pas eu ce silence), mais il y plus grave, bien
plus grave: le risque que cette déculpabilisation amène une répétition
de cette tragédie.

Car les candidats au meurtre religieux connaissent parfaitement les textes que j’ai épluchés dans L’islamisme et les Femmes, et que la justice française se refuse à prendre en considération.

En voyant la justice française, et ceux qui l’ont influencée, passer
outre ces textes pour faire de l’effet de la drogue une “circonstance
atténuante”, ils comprennent qu’il leur suffira de fumer du cannabis et
d’aller tuer des juives ou des chrétiennes pour qu’on puisse dire qu’ils
sont irresponsables.

Pour conclure, je cite Anne-Sophie Chazaud à
laquelle il “semblait pourtant que «assassin» venait de l’arabe
«Hashīshiyyīn», qui fume du haschisch… Et curieusement, d’habitude, la
prise de stupéfiants ou d’alcool, est précisément considérée comme une
circonstance aggravante du crime. Subitement, cela devient un quitus.
Elle est pas belle la vie ?” conclut-elle avec une ironie noire.

Non, elle n’est pas belle, la vie. Elle est de plus en plus horrible. On
va jusqu’à encourager la drogue en dépénalisant l’assassin de Sarah
Halimi sous prétexte qu’il était drogué.

Pourtant, la drogue n’abolit pas l’antisémitisme du meurtre de Sarah Halimi. (Cf le livre précité.) Les candidats au meurtre religieux savent parfaitement que l’assassinat de Sarah Halimi était antisémite. Et que la justice française n’a pu dire le contraire, sauf en passant outre l’existence de données sociologiques et religieuses de premier plan.

Lina Murr Nehmé, 21 mars 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

De la discrimination

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

De la discrimination

Comment en finir avec la discrimination
médiatique et politique face aux attentats? Faudrait en arriver jusqu’à
interdire à la presse de dire l’identité des victimes et le lieu où
elles sont mortes? Dans ce cas utopique, il y aurait la justice, même au
niveau de la mort, et un civil égalerait un autre civil,
indépendamment de leur religion ou de leur nationalité.

Rappelez-vous l’affaire la plus médiatisée de 2017 en France: l’affaire
du jeune Théo, qui accusait la poilice de l’avoir violé. A-t-on demandé
la publication de la vidéo prise par la caméra de surveillance, avant de
ruer sur tout ce qui était Blanc et de tenter de tuer des policiers? A
l’occasion, des policiers avaient été incendiés, et l’un d’eux a presque
entièrement flambé durant un temps suffisant pour causer dans son corps
des dégâts irréversibles. Quelqu’un a-t-il parlé de cette tragédie
vraie? Non: un syndicat a parlé de “poulet grillé”. Quelqu’un
cherche-t-il à savoir ce qu’est devenu ce policier si gravement brûlé?
Pas à ma connaissance: les médias n’en parlent plus.

Et pendant
qu’on croyait aveuglément le mensonge de Théo sans demander à voir la
vidéo pour savoir si c’était la vérité ou une calomnie, on ignorait le
massacre de Sarah Halimi en refusant de prendre en compte les éléments
prouvant qu’elle avait été tuée parce qu’elle était juive. Ce qui m’a
obligée à faire ma propre enquête, et à consacrer 40 pages dans L’islamisme et les Femmes,
à prouver que l’assassinat était religieux et que sans la religion et
le sexe de Sarah Halimi, il n’aurait pas eu lieu, en tout cas pas de cas
pas de cette façon féroce.

Dans le même livre, j’ai montré un
autre exemple terrible de cette discrimination: comment des tags sur une
mosquée avaient mis la France sens dessus-dessous, alors que depuis un
mois, le curé de l’église voisine, et son église, subissaient des jets
de pierre quotidiens, le cruré recevant même des parpaings: cela
s’appelle de la lapidation.

Qu’est-ce qui est plus important?
Une personne humaine ou un mur? (Sans compter qu’en plus, l’église avait
été lapidée et endommagée, et qu’un lieu de culte est infiniment plus
important qu’un simple mur d’enceinte extérieure.)

La même
semaine que les tags, le massacre d’un Français d’origine africaine —
mais chrétien — a également fait moins de bruit que les tags sur le mur.
À cause de l’identité de ses assassins.

La révolte que j’éprouve
face au manque de sympathie que subissent les victimes qui n’ont pas la
bonne couleur, ou la bonne religion, ou la bonne nationalité, je
l’éprouve depuis près de 45 ans. Je croyais, à cette époque, que les
chrétiens du Liban (ou les musulmans quand ils étaient dans le même camp
qu’eux), seuls, étaient victimes. Mais je m’aperçois que la guerre
faite aux Libanais a essaimé dans le monde entier, même si, nulle part,
le traitement des victimes n’a été aussi flagrant que dans la guerre du
Liban. Je pourrais ainsi donner des centaines d’exemples de massacres,
tuant parfois 2000 civils (Damour), et tus par les médias occidentaux
parce que les victimes étaient chrétiennes et les assassins
palestiniens. J’en ai donné beaucoup d’exemples dans mes deux trois
livres sur ce sujet: “Le Liban assassiné”, “Du règne de la Pègre au
Réveil du Lion”, et “Les otages libanais dans les prisons syriennes”.

Un des seigneurs de la guerre du Liban, habitué à infliger ces discriminations aux chrétiens, vient de déclarer que l’assassin de Nouvelle-Zélande était un si grand criminel qu'”il n’y a pas eu dans l’histoire un criminel qui puisse représenter [ressembler à] ce criminel”.

Il a ainsi allègrement passé outre aux massacres de Daech et de ses alliés (Boko Haram, Shabab, etc.), de Nosra, de l’OLP, du Hamas, pour ne pas parler des assassinats commis par le sultan ottoman Mahomet II, à qui on attribue un million de victimes entre morts et prises d’esclaves. Et j’en passe.

Discrimination, quand tu nous tiens !

Lina Murr Nehmé, 17 mars 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

L’imam Bajrafil et l’amour

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

“Nul n’est prophète en son pays” !

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin

“Nul n’est prophète en son pays” !

Au Liban, le Dar el-Fatwa a
poliment informé le ministère qu’il devait interdire la diffusion de
mon livre “Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur: ce qu’ils
cachent” dans le pays.

Cette institution rédige des fatwas, elle
interdit des livres: elle est dans son rôle. C’est elle qui a refusé de
recevoir une candidate à la Présidence de la République française sans
hijab. Et ce, alors que le voile n’est pas obligatoire au Liban. Il est
vrai que mes derniers livres parlent du voile, et de sujets sensibles.
Impossible d’expliquer le vrai discours de Tariq Ramadan, Tareq Oubrou,
Dalil Boubakeur, sans revenir aux textes qu’ils citent.

Si on
comprend que ces trois personnages soient protégés par leurs collègues
oulémas qui censurent mon livre, on comprend moins facilement pourquoi
cette protection s’exerce en France, en Belgique, et dans une moindre
mesure, en Suisse. En effet, on vient de me faire remarquer que les
bibliothèques universitaires francophones (françaises, belges et
suisses) mettaient moins de mes livres à disposition du public que les
universités américaines ou allemandes. Ainsi, il est plus facile à un
lecteur habitant à Munich, Chicago ou à un étudiant de Harvard ou
Stanford de me lire, qu’à un lecteur français, suisse, belge ou libanais
!

Et cela est valable pour d’autres auteurs qui parlent un autre
langage que celui d’Olivier Roy, Vincent Geisser, Alain Gresh ou
François Burgat, qui continuent d’être consultés et interrogés sur leurs
protégés.

Comme on ne peut pas censurer franchement, on ignore,
ce qui est aussi efficace. Et si cette censure existe, c’est bon signe:
c’est que le travail que l’on fait est efficace. Ce qui est inquiétant,
c’est que cette censure touche des livres qui aident des pays victimes
du prosélytisme et de l’islamisation agressive à y voir clair. Car toute
bibliothèque universitaire ou municipale, en France, possède les livres
de Tariq Ramadan, de Tareq Oubrou, de Dalil Boubakeur, ou de Ghaleb
Bencheikh, pour ne citer qu’eux. Sans parler des bibliothèques
musulmanes dans nombre de mosquées, à commencer par la Mosquée de Paris.
Et bientôt, qui sait, Mehdi Meklat aura le prix Goncourt. En face,
quels sont les livres qui fourniront aux étudiants de quoi se prémunir
contre leur discours ?

Je me souviens de cet étudiant que j’avais
plusieurs fois entendu, à la Bibliothèque Nationale de France,
endoctriner une étudiante voilée qui le regardait avec des yeux
passionnés. “Vous allez faire le djihad?”, lui demandait-elle entre deux
bouchées de sandwich. C’était en 2009, l’année où j’avais posé à Tariq
Ramadan la colle dont j’ai parlé dans “Fatwas et Caricatures” au sujet
du mariage d’Aïcha, et de l’esclavage. Qui sait si cet étudiant, et
peut-être cette étudiante, ne sont pas allés faire le djihad en Irak ou
en Syrie depuis, et ne sont pas, aujourd’hui, des “revenants”?

En
1982, aux Beaux-arts de Paris, quand l’action des islamistes en France
était encore assez faible. Je passais mon UV de tapisserie artistique,
et face à moi, à travers la trame, un garçon et une fille réalisaient
leur tapisserie; le garçon harcelait la fille en lui vantant sa religion
et la beauté du chant du muezzin. Sans doute avait-il lu ou entendu les
écrits du père de Tariq Ramadan, Saïd, ou ceux de Hamidullah, qui
sévissait à l’époque, pour qui toute musique est interdite à l’exception
de l’appel du muezzin. Et je devais ainsi subir tout au long de la
journée le fredonnement: “Allahou Akbar, Mohamed est l’Apôtre d’Allah!”

Ce matraquage par le haut (lobbying auprès des politiques) et par le bas (propagande et prosélytisme) produit des convertis, des professeurs islamistes et des djihadistes. On l’a payé, des années plus tard, avec les attentats sur le sol français. Le laxisme et la censure actuels se paieront plus cher encore dans un futur proche, car ce genre de mouvement ne croît pas en ligne droite, mais de façon parabolique. Les livres des éditeurs salafistes sont bien en vue à la Fnac; après l’avoir fait remarquer à un vendeur, un de mes lecteurs s’est fait répondre: “Après tout, ce ne sont que des livres !”

Ibn Taymiyya, El-Djazaïri, Qaradaoui et
leurs admirateurs. Puis, les islamistes honteux, qui entretiennent la
confusion sur les idées et les textes, et se font passer pour modérés
dans les colonnes des journaux et sur les plateaux de télévision. S’ils
l’étaient vraiment, ne devraient-ils pas commencer par dénoncer ces
auteurs qui mènent à la radicalisation, demander leur interdiction ? Et
on continue à les prendre au sérieux.

Est-ce normal ? Vous me
direz que la France n’est pas tout à fait dans son état normal. Comment
peut-on décrier un phénomène, et faire semblant d’ignorer les textes mis
en application ? Dans ces conditions, les livres d’histoire qui ne
sacrifient pas aux bons sentiments et au romantisme (“histoire”,
rappelons-le, signifie “enquête”), ou qui n’enrobent pas les pires
commandements d’une “spiritualité” imaginaire ne peuvent pas être bien
accueillis.

Les concepts flatteurs, les bons sentiments,
l’optimisme béat ne sont pas de circonstance. Pour que l’histoire arme
la pensée, il faut qu’elle aille à la rencontre des faits et des textes
qui planifient les actes à venir.

Tous mes livres contiennent des
centaines de traductions inédites, des documents reproduits en
fac-similé, et présentent des faits difficiles ou scientifiques dans un
style lisible, pour être accessibles à des lecteurs ordinaires. Ce sont
des livres sans jargon. Ce ne sont pas non plus des livres de
demi-savants, bourrés d’erreurs et de contresens, sous prétexte de faire
de la vulgarisation. Les propagandistes comme Tariq Ramadan ont des
mécènes richissimes, et ont des complices haut placés. Je n’ai payé
personne. Mais si des gens ordinaires lisent mes livres et en parlent,
la cause défendue par ces livres avancera. Même si ceux qui s’en servent
et les utilisent pour leur propre production n’ont pas l’honnêteté de
les citer.

Lina Murr Nehmé, 10 mars 2019

Email Twitter Facebook Pinterest Google+ Linkedin