Mitterrand et le petit Hitler libanais

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Massacre de Bmariam. Lina Murr Nehmé, 1984.

1er septembre 1983: commencement des massacres des chrétiens du Chouf au Liban, à l’anniversaire du début de la 2e guerre mondiale et des massacres de Pologne.

Une armée représentant quatre nations — américaine, française, anglaise et italienne — était là soi-disant pour aider les civils. En fait, c’était pour aider les civils palestiniens seulement. Quand il s’agit des civils chrétiens, Mitterrand argua la clause de non-intervention en-dehors de Beyrouth. Or à Beyrouth, les chrétiens n’étaient alors pas en danger d’être massacrés. Mais on savait qu’ils le seraient au Chouf, dès que les Israéliens se retireraient, car ceux-ci avaient laissé subsister deux armées, et il était évident qu’après leur départ, la plus forte des deux tuerait les civils de l’autre. Et la plus forte, c’était évidemment celle de Joumblatt, puisqu’il était l’homme des Syriens. En un jour, ses miliciens, quelques centaines, devinrent 2000, après l’entrée de soldats syriens et palestiniens au Chouf.

Les massacres du Chouf furent un nettoyage ethnique total, qui dura un mois. Tous les deux ou trois jours, il y avait un nouveau massacre. 60 villages furent ainsi nettoyés de toute présence chrétienne, alors que les chrétiens étaient majoritaires dans ce territoire. 60 Oradours-sur-Glane. Les églises furent brûlées ou démantelées, leurs pierres de taille étant utilisées pour construire les beaux murs des routes du Chouf. Les cloches disparurent durant des années pour empêcher les chrétiens, s’ils reconstruisaient leurs églises, de les faire sonner. Joumblatt, qui avait un goût artistique acéré, fit main basse sur les icônes des églises et des couvents pour orner sa maison. (Il les rendit sur l’intercession de hauts personnagesTrès longtemps après, les chrétiens survivants furent autorisés à rentrer chez eux et à reconstruire leurs maisons brûlées. Joumblatt avait réussi à se faire nommer ministre des réfugiés, et il exigea beaucoup plus d’argent pour ses druzes qui avaient squatté les maisons des chrétiens, que pour ces derniers, privés de leurs biens et des fruits de leurs arbres.

Entre-temps, le mal était fait. Les chrétiens n’ont reconstruit au Chouf que des résidences secondaires, n’osant pas y revenir. D’ailleurs, celui qui a fait sa vie en ville durant vingt ans ne revient pas s’installer en montagne.

Ce qui a initié la solution du contentieux est la montée du patriarche Sfeir au Chouf, dans les années 1990. Au Liban, la réconciliation se fait traditionnellement de la façon suivante: le tueur vient se livrer entre les mains de la famille de sa victime. C’est elle qui lui donne le pardon et le relâche, et il est en sécurité. C’est ainsi que se font les réconcilisations au Liban. Le patriarche Sfeir, lui, a marché sur la dignité des victimes, et il est tout à fait normal que Joumblatt dise tant de bien de lui. C’est ainsi que les dhimmis allaient autrefois se concilier leurs massacreurs, et Joumblatt aime qu’on se soumette à lui. Ne disait-il pas des maronites (ou des chrériens en général?) il y a quelques années: “C’est une mauvaise race”. Il se faisait filmer, et la vidéo a circulé. Voyant le pays scandalisé, il a dit que ce n’était pas fait pour être diffusé. Mais l’Occident n’a pas cessé ses relations avec lui.

N’a-t-il pas également appelé à tuer tous les druzes de Syrie parce qu’ils ne prenaient pas le parti de Daech et Nosra? Aucun homme, au Liban, n’applique le fascisme et le racisme à l’état pur, comme lui. Que gagne l’Occident à honorer un individu qui décrète l’extermination de tout un groupe humain sur base confessionnelle — et qui exécute cette sentence quand il en a le pouvoir? C’est lui qui, récemment, commettait un assassinat parce qu’un rival druze était monté au Chouf sans lui en demander la permission. Est-ce qu’un pays vous appartient du simple fait que vous avez exterminé ou déporté 60% de sa population? C’est un raisonnement hitlérien. Pourquoi l’Occident favorise-t-il des Hitler locaux?

Il est honteux que les chefs d’Etat occidentaux, connaissant tous ces crimes, aient continué à traiter avec Joumblatt, tout en sachant qu’en plus, il obéissait aux ordres de la Syrie. Quelques semaines après le génocide du Chouf, Mitterrand le reçut à l’Elysée, à égalité avec le Président de la République élu. Et il serra sa main tachée de sang chrétien. Il fit le même accueil à l’autre larron, Berri, qui avait envahi Beyrouth-Ouest, sans toutefois commettre de nettoyage ethnique.

Pour expliquer à mes amis la situation, il faut signaler que ces deux hommes ont été propulsés par Khaddam, le haut-commissaire syrien, en même temps que le Hezbollah, et à la même époque: en 1982-1983. Khaddam avait également des poulains chrétiens, et il a utilisé tout ce monde pour créer le chaos. Or c’est avec les hommes de la Syrie que l’Occident traitait, et avec eux seuls, au détriment de l’autorité légitime libanaise. J’ai fait il y a quelques semaines une conférence privée, enregistrée, sur l’histoire de la guerre du Liban. Elle est un peu longue, mais elle explique les choses de façon claire, en remontant au choc pétrolier de 1973, qui a causé la guerre du Liban.

Mitterrand a reçu Joumblatt et Berri à l’Elysée, à égalité avec le Président libanais, sous prétexte que ce dernier était chrétien. Mais au Liban, on ne dit pas “le Président chrétien”, on dit “le Président” tout court. Et quand on dit “Président”, on implique tout le pays et non une confession.

En faisant le contraire, en recevant deux hors-la-loi, chefs de milices confessionnelles, à égalité avec le Président légitime, Mitterrand a consacré dans les chancelleries et dans les médias la fable d’une division du Liban qui n’existait que dans son esprit, et qui a donné naissance au mot “libanisation”, alors qu’il n’y a jamais eu de division humaine sur le terrain. Il y avait seulement l’armée syrienne qui faisait occuper des parties du Liban par ses hommes de paille libanais interposés, en prétendant que le Liban était éclaté. Mais encore une fois, dans mes livres j’ai publié les preuves du contraire.

Ni Joumblatt ni Berri ne représentaient leurs communautés respectives. Les chiites dans leur majorité à l’époque, refusaient Berri. Et les meilleurs druzes refusaient Joumblatt. (Cf. le témoignage de l’un des druzes les plus considérables à cette époque, cheikh Farid Hamadé, que j’ai traduit dans mon livre “Quand les Anglais livraient le Levant à l’Etat islamique”, dans lequel je raconte l’histoire de la famille Joumblatt, entre autres. Il raconte comment Walid Joumblatt, après avoir massacré les chrétiens, a massacré des centaines de druzes qui lui étaient hostiles.) Si cela plaisait à Mitterrand de traiter avec des hors-la-loi impopulaires à l’exclusion des hommes populaires, c’est peut-être digne de son passé de collaborateur. Mais cela ne change pas la réalité de ces hommes et la haine que leur vouait alors le peuple.

En réalité, cela arrangeait les grandes puissances de prétendre que ce qui arrivait au Liban n’était pas une guerre d’extermination dirigée contre une nation, mais une guerre civile, un éclatement, une implosion. Ainsi pouvaient-elles laisser faire le massacre sans intervenir. Car il fallait satisfaire le roi qui avait voulu cette guerre et en avait financé l’essentiel: Fayçal d’Arabie. Et satisfaire les roitelets arabes qui faisaient aussi chanter l’Occident avec des contrats d’armement…

Tout cela se paie aujourd’hui. Les Israéliens savaient que les fedayine avaient commis des crimes contre l’humanité au Liban, puisqu’ils les ont alors publiés. Et ils les ont laissés partir sans jugement en 1982, parce que Mitterrand le voulait. Mais pourquoi poursuivre les criminels de guerre nazis après cinquante ans, quand ils les toléraient sur place, et qu’ils les avaient sous la main?

Et Joumblatt, n’avait-il pas commis des crimes contre l’humanité sous les yeux de la communauté internationale présente sur place? N’avait-il pas fait assassiner, égorger, tronçonner à la hache 3000 civils hommes, femmes et enfants? Pourquoi n’y a-t-il pas eu de tribunal international alors, et il y en a eu pour le seul Rafiq Hariri, qui n’était alors même pas Premier ministre?

Toutes les horreurs qu’on voit arriver maintenant dans le monde en matière de terrorisme et d’islamisme, remontent à tous ces abandons. Moi, franchement, je suis au-dessus du nationalisme étriqué. Défendre la France, la Pologne, le Liban ou n’importe quel autre pays m’est égal, pourvu que la cause soit juste. Je ne raconte donc pas ces choses comme étant concernée personnellement, sauf en tant qu’être humain. J’étais là-bas, et j’ai entendu les récits et la détresse des réfugiés, j’ai vu la cruauté des massacres, et le mensonge des alliés. On ne peut pas, à moins de trente ans, être témoin de tout cela, et rester de glace. Sinon, on n’est pas un être humain, on est un monstre. Je connais des réfugiés du Chouf qui vivent depuis 1983 dans un local gouvernemental qu’ils squattent. Une famille qui vivait, père, mère, quatre enfants, dans une seule pièce sans fenêtre. Le père est mort. Des enfants sont partis. il y a des petits-enfants, et la femme que j’ai connue, devenue handicapée, est toujours dans cette chambre. “Pourquoi ne rentrez-vous pas chez vous? — Il n’y a pas de sécurité. Et les druzes qui ont habité dans ma maison durant 25 ans, ont beaucoup sali, il y a beaucoup de choses abîmées. Cela coûte trop cher de restaurer.” Ils auraient restauré au fur et à mesure s’ils étaient restés dans cette maison, mais venir restaurer, en une seule fois, les dégâts causés par d’autres durant 25 ans d’usage… l’Etat libanais ne donnait pas assez d’argent pour cela.

Les chancelleries savaient tout ce qui se passait au Chouf, et elles savaient que c’étaient essentiellement des armées étrangères. Pour les preuves, voir mes livres “Le Liban Assassiné” et “Du règne de la Pègre au réveil du Lion”. Elles auraient pu sauver ces milliers de civils en démasquant les criminels. Elles n’ont pas bougé mais ont collaboré avec eux, n’étant pas humainement choquées, visiblement. La raison d’Etat? Est-ce que la raison d’Etat, concernant alors le pétrole et les contrats d’armement, mérite de voir mourir des milliers de civils tués à la hache, et de s’abaisser à serrer les mains au petit Hitler qui les a tués et de le recevoir à l’Elysée?

C’est en voyant l’humanité ainsi traînée dans la boue que j’ai pu, dès 1976, prédire que cette guerre se transporterait en Occident, et spécifiquement, en France. Car, quand on honore des Hitler chez le voisin, chez l’ami, on doit s’attendre à les voir débarquer chez soi, sous la même forme ou sous une autre, et sous un autre nom. Je suis bien désolée d’avoir eu raison: les mêmes stratégies utilisées par les Palestiniens contre le Liban sont actuellement utilisées en France, contre la France, les mêmes exactement. Il est vrai que les principaux financiers ont d’abord été les Saoudiens, en France comme au Liban, en Syrie et ailleurs.

J’écris cela alors que les bombes tombent au Sud, et alors qu’une nouvelle guerre peut être déclenchée.

Je comprends l’importance du pétrole pour l’Occident. Mais je crois que sa survie devrait être plus importante pour lui que son confort, ou même, son économie. Car le problème a quitté le domaine économique, il est devenu existentiel. On ne vend pas son bouclier, on ne vend pas sa poutre maîtresse pour faire du feu.

À l’occasion je publie pour la première fois une photo d’un tableau exposé en 1984, et fait pour commémorer le massacre de Bmariam, le 1er septembre 1983. Ne me demandez pas qui c’est: c’est inspiré par les horribles récits des réfugiés. A cette époque je voulais faire un tableau par massacre. Mais il y a eu trop de dizaines de massacres de chrétiens au Liban. J’ai abandonné l’idée après avoir fait quelques tableaux, dont celui-ci.

Lina Murr Nehmé,
1er septembre 2019, 36e anniversaire du massacre de Bmariam.

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“Fumer est Haram!”

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Souheil Hammoud, surnommé Abou Taou, était l’un des principaux artilleurs de l’opposition syrienne à Bachar el-Assad, et il tua beaucoup de soldats loyalistes. Il appartenait à l’armée djihadiste de l’ASL, mais il aimait fumer, et il décida de défier al-Qaïda/Nosra, qui se donne aujourd’hui le nom de Fatah-ech-Cham.

Il pensait que les services qu’il avait rendus à l’opposition, et sa propre réputation de tueur de soldats syriens, lui procureraient l’impunité. Il se fit ainsi photographier fumant devant un des panneaux placés par al-Nosra sur les routes: “Fumer est haram. Le narguilé est haram”, et signés “Vos frères moudjahidine”. Et il publia cette photo sur les réseaux sociaux.

Souheil Hammoud, de l’ASL, fume devant un panneau placé par al-Qaïda/Nosra, disant que fumer est haram.

Punition: il fut enlevé et traîné devant le tribunal selon la charia établi par al-Nosra, et qui était semblable à ceux de Daech. Ce tribunal le condamna à deux semaines de prison pour “manque de respect à l’islam”. Il publia ensuite sa photo avec un baillon devant un autre panneau. Je la publierai dans un autre article avec un commentaire spécifique.

Cette révolte personnelle contre la cigarette traduit la rivalité entre l’ASL et al-Nosra. La plupart des membres syriens de l’ASL ont été débauchés par al-Nosra qui, envoyée par Baghdadi former une branche syrienne de Daesh, proposa à ces djihadistes des paies plus importantes que celles qu’ils percevaient dans l’ASL. Al-Nosra fut ainsi formée au début, de ces dissidents de l’armée syrienne qui avaient accepté, au début de la révolution, de passer à al-Qaïda pour des soldes plus consistantes, payées par les pays du Golfe.

Souheil Hammoud faisait partie de ceux de l’ASL qui ne se sont pas laissés débaucher par al-Nosra durant toutes ces années. Il croyait que ses hauts faits militaires lui vaudraient l’impunité, pensant que l’opposition ne pouvait se passer de lui.

www.akhbaralaan.net/news/arab-world/2017/05/04/سهيل-أبو-التاو-من-صائد-دبابات-الأسد-إلى-سجون-هيئة-تحرير-الشام

Dans l’affaire du tabac, al-Nosra a poursuivi la même politique que Daech qui, non seulement interdisit le tabac, mais assembla tout ce qu’elle avait pu confisquer dans les commerces et les maisons, et… le brûla dans un grand feu… infligeant aux gens de fumer une énorme quantité de tabac à la fois, et… malgré eux.

Attention. Ce n’est pas parce que le tabac est nocif pour la santé qu’al-Nosra, dans ce panneau, le juge haram: al-Qaïda, dont elle fait partie, ne donne pas un sou pour l’opinion des médecins mécréants.

Mais Ibn Abdel-Wahhab, le cofondateur du royaume saoudien et le père du wahhabisme, l’avait dit. Et il fouettait ou tuait les délinquants.

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Il y a général et général…

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Les commandants en chef de l’armée libanaise espèrent souvent, en favorisant les agresseurs de la légalité libanaise, que les Arabes feront pression pour les faire élire Présidents de la République.

Il y a eu ce cas en 1958, et Fouad Chehab est devenu Président parce qu’il n’avait pas accepté de faire intervenir l’armée pour défendre la légalité. Si le Premier ministre musulman Sami Solh n’avait pas agi en sens contraire au risque de sa vie, de son portefeuille et de son avenir politique, il n’y aurait plus de Liban.

L’injustice de ce monde a donné le pouvoir à l’homme qui avait prétendu que le Liban était en état de guerre civile. Et comme Fouad Chehab savait qu’il n’en était rien, il fit le nécessaire, une fois Président, pour renforcer les services secrets de façon tentaculaire.

Le général Michel Aoun, ayant refusé d’admettre que ce conflit était une guerre civile et dit qu’il “ne prenait pas parti”, fut écarté et exilé en 1990-1991, par la volonté internationale, alors que la majorité libanaise était avec lui.

Le général Kahwaji connaissait ces précédents, et il préférait, comme Fouad Chehab, ne pas trop résister aux puissances qui soutenaient l’ennemi. Quand Daech et Nosra occupèrent une partie du territoire libanais à Ersal, il envoya naturellement l’armée libanaise se battre contre eux. Elle fut victorieuse, mais eut beaucoup de martyrs, dont certains furent tués avec l’approbation du maire d’Ersal (photo).

Mais l’échéance présidentielle approchait. Tout changea donc à Ersal quand Kahwaji rencontra Hariri, qui revenait d’Arabie Saoudite, pays dont il est citoyen. Après cette rencontre, Kahwaji ordonna à l’armée d’arrêter les opérations alors qu’elle était victorieuse. Puis il lui ordonna de laisser les djihadistes partir. Et dans sa précipitation, il omit d’exiger la libération des otages libanais que détenaient les djihadistes de Daech et Nosra. C’est à ce sujet que je lui ai adressé ce message, qui scandalisa beaucoup de monde, parce que toute personne attachée au Liban défend l’armée libanaise, seule institution restée laïque, et servant tout le monde sans distinction de religion. En pleine guerre, ils ne concevaient donc pas que je puisse en critiquer le commandant en chef.


Je ne crois pas que mon post choque encore, cinq ans après. Car, quelques jours avant le départ des terroristes avec leurs otages, Daech et Nosra annoncèrent qu’elles égorgeraient les otages un à un, si le Liban ne libérait pas les terroristes islamistes détenus dans ses prisons.

Pour commencer, le soldat sunnite Ali Sayyed fut égorgé par Daech. Les djihadistes avait d’abord pris soin, comme ils firent plus tard avec les otages occidentaux, de lui extorquer un reniement filmé, de façon à le tuer aussi dans sa réputation. La vidéo de sa décapitation circula, et l’armée n’annonça pas sa mort, considérant qu’il était un déserteur passé à Daech. Ceci révolta le pays, qui considérait que Daech ne pouvait tuer un soldat libanais déserteur.

Des jeunes brûlèrent les drapeaux de Daech et Nosra, de façon quasi anonyme, et les firent circuler sur les réseaux sociaux. Mais le 30 août, le ministre de la justice, Achraf Rifi, un ami des djihadistes de Tripoli, et notamment de Omar Bakri Fustok, réclama pour eux la prison “et les peines les plus sévères”.

Personne n’osa réagir ou manifester, alors que tout le pays était électrifié. Deux personnes seulement réagirent, toutes deux sur les réseaux sociaux: Charbel Khalil et moi. Lui écrivit sur son compte Twitter: “Bon, ce drapeau, on ne peut pas le brûler, mais est-ce qu’on peut se torcher avec?” Et moi, je me fis photographier brûlant ce drapeau et je mis ma photo sur les réseaux sociaux.

Lina Murr Nehmé, le 17 août 2018

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Benoît Hamon et Wadih al-Asmar

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En juin 2018, Wadih al Asmar est devenu le président d’EuroMed-Droits, qui rassemble plus de 80 organisations de droits de l’homme des deux côtés de la Méditerranée. Quelques jours plus tard, il est ingénieur informaticien en chef de Malomatia Qatar, et il réside au Qatar. Il traîne le Liban dans la boue, mais il ne critique pas le Qatar.

Cela veut dire qu’à ses yeux, le Qatar respecte les droits de l’homme quand il coupe les têtes, fouette les homosexuels et les musulmans qui ont bu une goutte de vin, condamne les apostats à mort, emprisonne à vie les poètes qui ont osé critiquer le régime, fouette les gens qui ont eu des relations sexuelles extra maritales, et interdit aux chrétiens de sonner les cloches, d’avoir des croix, des images saintes ou tout autre signe chrétien à l’extérieur de leur église.

Eglise catholique Sainte-Marie de Doha: tout ce qui peut faire penser à une église (clocher, croix, icônes, statues de saints) est interdit: la charia règne au Qatar. Photo Wikipedia

Le Liban en revanche, ne respecte pas les droits de l’homme aux yeux de Wadih el Asmar, parce qu’il a un problème d’ordures, et parce que les gens de Byblos se sont plaints d’une soirée musicale.

Lina Murr Nehmé, 17 août 2018

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Un soulier d’enfant…

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Soulier d’enfant ramassé sur le lieu du mariage, à Kaboul, où un attentat-suicide a fait aujourd’hui plus de 63 morts et 182 blessés.

Daesh a fièrement revendiqué l’attentat, disant qu’elle avait “tué et blessé 400 rafidah mécréants et forces de l’ordre afghanes apostates”. Daech désigne sous le nom de “rafidah”, les “hérétiques” comme les chiites, les ibadites et autres, dont il a décrété l’extermination. Ici, il s’agit de chiites.

Lina Murr Nehmé​, le 18 août 2018

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Le 9 août

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Les nazis prônaient une religion païenne semblable à la mythologie des opéras de Wagner. Son inspirateur Alfred Rosenberg était ouvertement païen, et le ministre Himmler mit au point un rituel nazi ouvertement païen. Hitler lui-même méprisait le christianisme et vouait son admiration aux héros de Wagner, qui reflétaient son idée de la race supérieure.

Hitler en avait surtout contre l’Église catholique: le fait d’écouter Radio Vatican pouvait valoir à un Allemand la mort.

Mais surtout, il en avait contre les juifs, qu’il décrivait comme une race inférieure. Mais pour ne pas s’aliéner le public allemand, il se prétendait chrétien. Il devait avoir de gros problèmes en pensant que le Christ et sa mère dont se réclamaient les Allemands — ainsi que leur ancêtre David — étaient des juifs.

Parce qu’Hitler prétendait les juifs inférieurs en tant que race, il faisait arrêter à la fois les juifs et ceux d’entre eux qui s’étaient convertis au christianisme.

La religieuse Edith Stein se retrouva donc à Auschwitz, où elle fut martyrisée en 1942, le 9 août. La phrase sur cette photo d’Edith Stein est tirée d’une lettre écrite par elle au pape dès 1933 déjà, pour lui demander d’intervenir contre le nazisme… :

“Etant une enfant du peuple juif… et aussi une enfant de l’Eglise catholique, j’ose parler au Père de la chrétienté de ce qui opprime des millions d’Allemands.”

En ce jour qui est aussi l’anniversaire de la destruction des deux Temples de Jérusalem, par les Chaldéens (-586), et par les Romains en 70, solidarité avec les juifs.

Solidarité aussi avec les chrétiens persécutés, peut-être nulle part autant qu’au Japon, où ils furent pourchassés et exterminés dans des tortures horribles durant 400 ans, et où ils survécurent sans même avoir de prêtres, se fabriquant des statues du Christ et de la Vierge déguisés en Bouddha et en sa mère, et les appelant “le Bon Dieu du placard” car ils les cachaient dans des armoires.

Ces rescapés du génocide des chrétiens du Japon vivaient surtout à Nagasaki, où la bombe atomique les frappa un 9 août aussi, tuant 70.000 à 100.000 personnes.

Lina Murr Nehmé, le 9 août 2019.

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Les armes à l’uranium apauvri

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L’uranium apauvri est un déchet des centrales nucléaires. Il est donc quasi gratuit. Comme ce métal est très dense, un obus ayant un pénétrateur en uranium apauvri perce facilement le fer dont sont faits les blindés. L’idée de se débarrasser de déchets encombrants pour tuer l’ennemi a fait son chemin.


L’uranium apauvri n’est pas censé être radio-actif, et il a été classé parmi les armes conventionnelles. Mais quand il brûle (ce qui est le cas au moment de la mise à feu du projectile, et de son impact sur les cibles blindées), il produit des poudres hautement radioactives qui pénètrent dans le corps par inhalation, mais peuvent aussi polluer le sol.

Un épisode de la guerre du Golfe le prouve. Quand un char américain porteur de munitions à l’uranium apauvri a explosé en Irak en 1990, une commission américaine spécialisée a été rapidement dépêchée sur place pour l’étudier. Elle examiné le tank, et en a extrait les parties qui pouvaient être décontaminées. Elle a soigneusement emballé les parties irrémédiablement contaminées et les a envoyées aux Etats-Unis pour qu’elles y soit enterrées en tant que déchets radio-actifs. Elle a également examiné le sol, au-dessous du tank, et l’a trouvé radio-actif.

Malgré cette découverte, le gouvernement américain a utilisé cette arme alors inconnue dans la guerre contre l’Irak, sans en informer ses électeurs. Le rapport des spécialistes qui avaient examiné le tank, resta secret, et fut par la suite déclassifié.

Les Américains ont utilisé en Syrie contre l’Etat islamique en 2015, des obus à l’uranium appauvri.
Photo SAFIN HAMED – AFP



Après la guerre de 1991, on constata une augmentation foudroyante du nombre de cancers et de malformations congénitales chez les enfants en Irak, cancers attribués à l’usage de l’uranium apauvri, car, explique une résolution de l’Union Européenne, “depuis son utilisation par les forces alliées dans la première guerre contre l’Irak, de sérieuses inquiétudes se sont fait jour quant à la toxicité radiologique et chimique des fines particules d’uranium libérées au moment de l’impact des projectiles contre des cibles blindées”, et “des craintes ont également été exprimées quant à la contamination du sol et des nappes phréatiques par des projectiles ayant manqué leur cible, avec les conséquences qui en résultent pour les populations civiles… Il existe de nombreux témoignages sur les effets nocifs, et souvent mortels, tant sur les militaires que sur les civils… l’emploi d’uranium appauvri dans les conflits viole les règles et principes fondamentaux consacrés par le droit international humanitaire et environnemental, écrit et coutumier.”

Dans la guerre contre l’Etat islamique, les Etats-Unis ont utilisé en Syrie des armes à l’uranium apauvri. Il peut donc y avoir eu dans ce pays — comme autrefois en Irak, au Koweït et en Afghanistan — une pollution durable qui, en cas de pluie, peut s’être communiquée à la nappe phréatique des régions concernées. Et la pollution nucléaire ne disparaît pas de sitôt.

Lina Murr Nehmé, 7 août 2019

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Les questions des années 1982

Dans les années 1982, un médecin m’a dit qu’à Strasbourg, on faisait des expériences pour s’assurer que le sperme de l’homme était fertile avant de procéder à une fécondation in vitro. On fécondait des guenons avec du sperme humain.

Au début des années 1980, un médecin m’a dit qu’à Strasbourg, on faisait des expériences pour s’assurer que le sperme de l’homme était fertile avant de procéder à une fécondation in vitro. On fécondait des guenons avec du sperme humain.

Je me suis toujours posé la question de ce qu’il advenait de ces ovules de guenon fécondés avec du sperme humain — puisque, visiblement, ils existaient. Je pense qu’on devait les tuer, car on n’en a jamais entendu parler. C’est encore un côté Frankenstein et horrible de la science moderne.

Les années suivantes, on nous a dit que le sida venait des relations sexuelles de l’homme avec le singe, en Afrique. Visiblement, cela ne se faisait pas dans des éprouvettes.

Maintenant, on évoque toujours le singe et l’Afrique, mais non les relations sexuelles. Je suppose qu’un jour, je saurai toutes les réponses à ces questions que j’éludais à cette époque par pudeur, et que je pose pour la première fois.

Lina Murr Nehmé, 5 août 2019


Hassan al-Banna et le mufti de Jérusalem

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L’importance qu’a la Palestine pour les djihadistes ne date pas d’hier. Elle date du temps où le père de Tariq Ramadan, Saïd Ramadan, alla fonder en Palestine une branche des Frères Musulmans (qui gouverne aujourd’hui le pays à travers le Hamas).

Saïd Ramadan. Photo publiée dans Le Point

Solidarité de caste et d’organisation oblige, les Frères Musulmans ont toujours été solidaires de l’OLP, y compris dans ses massacres de chrétiens libanais au Liban, ou d’athlètes israéliens à Munich.

Une amitié liait Hassan al-Banna, fondateur des Frères Musulmans, et le mufti Hajj Amine Husseini, nommé par les Anglais mufti de Jérusalem. Cette solidarité se poursuit de nos jours. Les Frères Musulmans et le mufti de Jérusalem ont eu des disciples et des admirateurs de génération en génération. Yasser Arafat se réclamait de ce mufti, ce qui implique qu’il endossait ses massacres de juifs. A cette époque, il n’y avait pas Israël: tous étaient palestiniens. Le grand-père de Tariq Ramadan avait envoyé depuis les années 1940 de l’aide, et même des hommes égyptiens pour aider les musulmans palestiniens (ou la petite partie qui suivait le mufti) à massacrer des juifs palestiniens pour, soi-disant, aider l’islam en Palestine. Le résultat fut la création de l’Etat d’Israël et la trégédie de centaines de milliers de réfugiés palestiniens. Qui ont à leur tour fait la tragédie des Libanais quand ils ont voulu prendre leur pays.

Tout cela vous permettra de comprendre pourquoi aujourd’hui, l’antisémitisme grandit à mesure que l’islamisme s’étend, notamment en France.

Lina Murr Nehmé, 4 août 2019.

Pour en savoir davantage sur l’action du mufti de Jérusalem, lire: Lina Murr Nehmé, Quand les Anglais livraient le Levant à l’Etat islamique, Salvator, 2016


Lina Murr Nehmé, Quand les Anglais livraient le Levant à l’Etat islamique

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La bataille de Belgrade, 6 août 1456

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Siège de Belgrade d’après une miniature ottomane

Le sultan ottoman Mahomet II vainquit Constantinople en 1453, et avança ensuite en Europe avec une vitesse foudroyante. Il croyait pouvoir prendre Rome et, pour encourager ses soldats qu’il envoyait par centaines de milliers à l’assaut des villes d’Europe Centrale, il leur faisait crier: “Roma! Roma!”

Ci-dessous, extrait de mon livre “1453: Mahomet II impose le schisme orthodoxe”, qui raconte la bataille de Belgrade, dont on commémore la victoire, le 6 août:

“En juillet 1456, il [Mahomet II] commença à assiéger et pilonner Belgrade. Mais Hunyadi, un vieillard de près de 70 ans, avait prévu cette guerre et constitué une flotte avec 40 petits bateaux et un grand. C’était dérisoire, face aux centaines de galères turques dont des dizaines étaient très grandes, et qui, reliées l’une à l’autre par une chaîne, formaient un rempart fluvial autour de Belgrade. Le 14 juillet à l’aube, pourtant, Hunyadi attaqua la flotte turque et la vainquit. 

Siège de Belgrade

Dans le combat au corps à corps qui suivit, les chrétiens tuèrent 500 Turcs, brisèrent la chaîne et entrèrent dans Belgrade, où ils s’enfermèrent.
Les soldats de l’armée de Mahomet furent démoralisés d’avoir été vaincus par une troupe si petite, et armée de façon si ridicule. Mais un discours du sultan les encouragea, et les bombardements reprirent, féroces. Trois larges brèches s’étant ouvertes dans les murs de Belgrade, ils foncèrent et entrèrent, le 22 juillet, en criant “La Ilaha IllAllah !”, dans la ville qui semblait vide de ses habitants.
Les janissaires commencèrent à pénétrer par milliers dans les maisons pour la traditionnelle curée.  Mais soudain, une trompette sonna.  Des centaines de chrétiens en armes les attaquèrent et les combattirent au corps à corps. Les chrétiens eurent 60 morts, et la plupart des Turcs moururent : “D’innombrables guerriers turcs, écrit Saadeddine, goûtèrent le miel pur de la mort des martyrs et furent pris alors dans les bras des houris du paradis”.

Weapons and Warfare

Mais ils n’avaient pas vu le pire… Le 6 août, 100 000 Turcs virent 8 000 de ces pèlerins [guidés par Jean de Capistran] émaciés par les jeûnes et les mortifications, mal vêtus, et presque désarmés, fondre sur leur camp et s’emparer de la plupart de leurs canons. Ils furent tellement terrifiés par leur audace qu’ils les laissèrent faire, et que les janissaires eux-mêmes refusèrent de se battre. En vain le sultan cria et tempêta. Il finit par tuer sa garde de sa propre main.
Après cette cuisante défaite, il quitta Belgrade la tête basse.
Hunyadi et Capistran moururent quelques jours plus tard. Leurs succès, là où cela paraissait impossible, relevèrent tellement le moral européen que le pape Callixte III décida que le 6 août, date de la victoire de Belgrade, on célébrerait désormais la Transfiguration — et c’est encore le cas aujourd’hui.”

Lina Murr Nehmé, 6 août 2019
extrait de “1453: Mahomet II impose le schisme orthodoxe”. (Epuisé, réédition prochaine)

Lina Murr Nehmé
1453: Mahomet II impose le schisme orthodoxe”, publié à Beyrouth en 2001, réédité par F.X. de Guibert en 2003, et en 2006. Egalement publié en arabe et en anglais, il sera bientôt réédité.

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