Une noce dans un village libanais en 1954. Il s’agit du mariage de mes parents, le 10 octobre.
À cette époque, comme dans ma jeunesse, chaque femme faisait venir la couturière et lui expliquait comment elle voulait les manches, la forme du col, les épaules, la longueur de la robe. J’ai connu cela. J’ai même fait des robes, car nous apprenions la couture à l’école, et nous avions un examen de couture, filles et garçons. C’était au programme. Pour mon BEPC, ainsi, nous avions à couper et coudre une bavette de bébé.
Nos robes étaient toutes originales, toutes seyantes. Et beaucoup plus seyantes qu’aujourd’hui, où elles semblent parfois faites, soit pour attirer les hommes physiquement en dénudant tellement le corps qu’il en voie tout (très antiféministe, cela), soit pour les repousser en l’habillant comme un sac de pommes de terre. Il est vrai que les modes occidentales et le prêt-à-porter qu’on achète depuis qu’on ne coud plus, sont, comme le jilbab et le tchador, des inventions d’hommes. Chacun impose à la femme le costume qu’il veut, en la flattant pour la persuader de l’accepter. L
P.S.: Le vieil homme est le grand-oncle de ma mère, qui lui donne le bras jusqu’au moment où elle verra son futur, soit à la porte du domaine de l’église. Alors elle entre à l’église au bras de ce dernier, après qu’il y ait eu une “bagarre” de village, chacune des familles tirant son rejeton pour que le conjoint ne puisse pas dire que c’est lui qui est allé au mariage le premier. C’est le grand-oncle qui lui donne le bras parce que son père était furieux de ce qu’elle ait vu son futur le jour même, et qu’ils soient allés dans une église catholique, alors que son propre père était pope. D’où les larmes de ma mère après que mon grand-père lui ait fait une scène et ait dit; “Je ne lui donnerai pas le bras pour la prendre à l’église.” Alors le grand-oncle l’a grondé et a dit: “Tu ne lui donnes pas le bras? Eh! bien, c’est moi qui vais le lui donner.”
Lina Murr Nehmé, 11 octobre 2019
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