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Zelensky, pour se donner une contenance…

Zelensky est aux États-Unis, officiellement pour dire qu’il a besoin “rapidement” d’une nouvelle assistance américaine. Officieusement, il a probablement été convoqué par Biden pour que celui-ci tente de le convaincre de négocier, car il n’est plus possible de soutenir la guerre d’Ukraine, gouffre humain et financier.

Mais le général ukrainien Zaloujny parle d’un budget de 350 à 400 milliards de dollars, dont 17 millions d’obus d’artillerie.

Dans l’administration américaine, les avis à ce sujet sont partagés.

Les uns voudraient en finir. Mais Biden tient à continuer à soutenir Zelensky. Il a demandé des sommes d’argent folles pour l’Ukraine, mais les États-Unis sont exsangues, quasiment. Ils ont eu 31,4 trillions de dollars de dette souveraine fin 2022. Ils ne peuvent plus se permettre de financer Zelensky, surtout qu’une grande partie de l’argent est allé dans ses poches et celles de fonctionnaires hauts et petits. La fortune de Zelensky est colossale, et elle ne peut pas s’expliquer seulement par ses cachets d’acteur à succès. Il suffit de voir l’étendue de son patrimoine immobilier un peu partout dans le monde pour s’en convaincre.

Connaître toute cette corruption est décourageant pour les donateurs.

Malgré ça, Kiev a reçu, depuis février 2022, au moins 246 milliards d’euros sur le plan militaire, financier ou humanitaire. Les Américains, à eux seuls, ont donné ou annoncé 75 milliards d’euros d’aide, dont 46,3 milliards en aide militaire

En d’autres termes, plus de la moitié de l’argent donné est resté en Amérique. Il a été reversé aux usines de fabrique d’armement.

Mais l’arsenal américain est dégarni. Les Américains envoient à l’Ukraine leurs propres réserves dans certains cas, et ils n’arrivent pas à les reconstituer assez vite.

Il faudra plusieurs années pour finir de compenser le trou dans l’arsenal, certaines des pièces prenant beaucoup de temps à faire. S’il y a une guerre – et c’est toujours possible –, les États-Unis ne sont pas certains de pouvoir vraiment y faire face. D’ailleurs, leur armée sait-elle encore se battre ? Elle a été battue par al-Qaïda, puis par les Talibans.

Les Russes, nous disait-on, allaient perdre à plates coutures. Puis on nous a dit que Poutine se trouverait dans une impasse. Maintenant, il est clair que c’est une victoire écrasante qui se prépare.

Mais les Américains ne veulent pas trop avoir l’air perdants. Ils ont infligé de nouvelles sanctions à la Russie, comme pour ralentir une victoire qui s’annonce éclatante.

Lina Murr Nehmé
13 décembre 2023

Zelensky, la fin

Sur le terrain, il est clair que l’Ukraine ne peut plus gagner. L’armée ukrainienne fait du sur place et perd parfois des centaines, voire des milliers de soldats à la fois. Et il n’est pas possible de les remplacer, puisque des millions d’Ukrainiens ont fui le pays, et que la Russie a annexé une partie de l’est et du sud du pays, et naturalisé leurs citoyens. Les Russes ont des fortifications qu’il est difficile de percer, et ils ont intensément miné les champs qui les entourent. Les Ukrainiens sont de plus en plus nombreux à préférer l’idée de paix, même s’il leur faut pour cela sacrifier des territoires.

En fait, Zelensky a été près de signer un accord beaucoup plus avantageux avec les Russes il y a deux ans. Mais Boris Johnson l’a obligé à faire marche arrière en lui disant qu’il ne recevrait plus d’argent s’il faisait la paix. Apparemment, M. Zelensky gagne beaucoup dans cette affaire, puisqu’il a accepté de quitter la table des négociations.

Il ne peut pourtant pas cacher l’hécatombe. Les morts ukrainiens se comptent par centaines de milliers. Les photos aériennes des cimetières sont effrayantes. Ceci, sans compter les soldats restés sur le champ de bataille, soufflés par des explosions, et qui sont en train de pourrir, mêlés à la boue. C’est très déprimant pour leurs compagnons, car le mauvais temps est revenu. Il a plu, ils ont pataugé dans la boue, et maintenant, il neige. Cela fait plus d’un an qu’on les envoie se faire tuer. Ils n’ont plus de munitions, et ils en veulent à Zelensky qui vit dans un palais et se paie des voyages pour se faire applaudir par les assemblées parlementaires les plus prestigieuses, tandis que sa femme porte des bijoux très chers et s’affiche dans des tenues de luxe, valant des milliers de dollars. Elle dépense des sommes folles. Une employée chez un bijoutier de New York affirme qu’en un seul jour, elle a acheté pour plus d’un million de dollars de bijoux dans sa boutique.

Voyant le train de vie que mène Zelensky, les Ukrainiens se demandent pourquoi il les prive du nécessaire. En face, l’armée russe est bien équipée, et dispose de ressources qui semblent illimitées. Les Russes sont beaucoup plus nombreux que les Ukrainiens, et peuvent mobiliser à volonté. Et leurs fabriques de munitions tournent 24h sur 24. Les Ukrainiens, eux, sont de moins en moins nombreux. En désespoir de cause, Zelensky est obligé de les faire enlever dans la rue. Il mobilise aussi des femmes, et même, des handicapés. Des dizaines de vidéos circulent à ce sujet sur les réseaux sociaux en Ukraine.

Dans ce cas, à quoi bon continuer la bataille ? Puisque de toute façon les Ukrainiens vont perdre ces territoires, autant faire cesser cette guerre sanglante immédiatement, plutôt que de perdre encore des dizaines ou des centaines de milliers de morts.

En outre, depuis le début de la guerre à Gaza, les médias ne parlent plus de l’Ukraine. Les populations occidentales se sont désintéressées de cette guerre. Biden a demandé cent milliards dont 60 pour l’Ukraine et 40 pour Israël, mais les États-Unis ne sont plus la grande superpuissance d’autrefois. Ils sont au bord de la faillite, et pourraient s’écrouler financièrement.

Les Ukrainiens, en tout cas, ne semblent plus croire à la victoire, et c’est ce qui explique leur désir de faire la paix à un prix qu’ils refusaient encore, un an plus tôt : la perte de territoires. Le sondage cité par Bloomberg le montre.

Au printemps 2021, Zelensky aurait pu signer la paix à un prix moindre. Maintenant, c’est différent. La Russie tient une partie importante du pays, et elle a naturalisé ses citoyens. Elle semble vouloir continuer ses conquêtes jusqu’au fleuve Dniepr, une frontière facile à défendre.

Zelensky lui-même est découragé. Mais il tient bon parce qu’il ne veut pas perdre la face. Et parce qu’il est difficile pour lui de proposer la paix alors qu’il a interdit que l’Ukraine négocie avec la Russie tant que Poutine sera au pouvoir. Maintenant, il veut probablement faire monter les enchères. Jusque-là, et malgré ses promesses électorales, il avait accepté de faire la guerre parce qu’on le payait. Si on le paie pour faire la paix, il acceptera probablement de la faire.

Affaire à suivre.

Lina Murr Nehmé,

25 novembre 2023

Le Liban, pays de la vie

En cette fête de l’indépendance, je regarde la photo d’une fille qui était belle avant de se mutiler en faisant exploser son corps pour tuer des civils ennemis. Je songe à ce qui reste des corps de jeunes gens qui se sont décapités eux-mêmes dans un but similaire, et j’ai le cœur serré.

Je regrette qu’ils n’aient pas compris la vérité.

J’ai toujours pensé que la divinité qui aurait créé l’homme, ne pouvait pas ordonner la haine et le meurtre, puisque cela détruisait son œuvre. C’est pour cela, me disais-je, que le Dieu de la Bible a dit : « Tu ne tueras pas. »

Le meurtre est un crime, il n’est pas un martyre.

En voyant tous ces peuples se venger de façon plus ou moins terrible, je pense que personne n’a souffert autant que nous autres, Libanais, et souffert, surtout, parce que notre souffrance n’était pas prise en compte, et pas même racontée. On a fait de nous des bourreaux de nos bourreaux. Il n’y a pas plus horrible que de passer pour un bourreau quand on est une victime.

Malgré tout cela, nous n’avons jamais utilisé le terrorisme contre qui que ce soit. Malgré tous les malheurs qui ont frappé le Liban au cours des âges, il n’est jamais devenu violent. Il n’a jamais agressé personne. Au contraire, il a toujours eu pitié de ses ennemis, venant à leur secours quand ils souffrent.

L’armée libanaise préfère même risquer la vie de ses membres plutôt que de tuer des civils ennemis. Elle ne se contente pas de leur donner des avertissements avant les bombardements : elle assure le transport de chacun d’eux, et ne commence la bataille que lorsqu’ils ont tous été évacués.

Et ce travail humanitaire lui coûte du sang. À Nahr al-Bared, par exemple, elle a mis une semaine à évacuer les civils ennemis. Beaucoup de soldats ont été blessés et deux d’entre eux tués en sauvant les civils de l’ennemi qui venait d’égorger et d’éborgner 20 de leurs compagnons dans leur sommeil.

Vive l’armée libanaise,

Vive le Liban.

Vive les valeurs du Liban, de son armée et de son peuple.

Avec l’espérance de la résurrection du pays dont la noblesse, la magnanimité et la moralité ne meurent jamais. Et surtout, Liban, ne change pas de symbole, ne change pas de drapeau, et ne change pas d’hymne national.

Lina Murr Nehmé

22 novembre 2023

Le bébé qui criait sous les bombes à Beyrouth, 1978

Des Palestiniens, à Gaza durant les bombardements, célébraient un mariage et s’amusaient en chantant et dansant dans une cour. En regardant la vidéo, j’évoque nos rires sous les bombes durant la Guerre des Cent Jours à Beyrouth-Est. Nous faisions de la résistance en résistant à la peur.

Le premier soir, par exemple, et alors que les bombardements et les tirs étaient très serrés, je refusai d’arrêter de faire la vaisselle, ou de la faire à la lueur de la bougie pour plaire aux Syriens qui, postés dans la rue, à vingt mètres de notre immeuble, tiraient au fusil sur les fenêtres allumées.

La famille s’était réfugiée dans l’entrée, la partie la moins exposée de l’appartement.

– Lina, viens ici ! ordonna ma mère.

– Quand j’aurai fini ! criai-je. Je ne vais pas laisser la vaisselle sale pour leur plaire !

Ces messieurs étaient mécontents et tiraient. Ils voulaient forcer tout le quartier à éteindre ses lampes. Je réalisai que j’étais la seule à avoir gardé une lumière allumée quand l’un d’eux cria à un autre qui se trouvait de l’autre côté de la rue :

– Elle est encore là ?

– Oui.

– Tire !

Et il tirait encore, et encore.

L’inquiétude rendait ma mère folle. Elle cria :

– Freddy ! Dis-lui de laisser ce qu’elle fait et de venir ici !

Papa émit un ordre péremptoire qui n’admettait pas de discussion. Je me séchai les mains et je les rejoignis. Nous nous mîmes à parler de la guerre et des intentions d’Hafez el-Assad qui nous bombardait – ou plutôt de Khaddam, son ministre des Affaires Étrangères, qui décidait de tout dans cette guerre du Liban, parce qu’il était sunnite et favori des Saoudiens.

Les voisins du dernier étage descendirent avec leur bébé. Nous leur ouvrîmes.

– Nous pouvons nous asseoir sur votre palier ? demanda le voisin.

Il nous expliqua que des roquettes étaient tombées dans leur appartement.

– Bien sûr, dirent mes parents. Vous êtes les bienvenus.

Nous leur apportâmes des rafraîchissements, mais ils ne voulurent pas manger, disant qu’ils avaient déjà dîné. Nous laissâmes notre porte ouverte, et nous apportâmes pour eux des chaises. La voisine tint à porter sa fille sur ses genoux. Elle avait si peur qu’à chaque arrivée d’obus, elle criait en serrant sa petite fille dans ses bras. L’enfant, un bébé d’un an et demi, sursautait alors et pleurait avec désespoir. Sa douleur faisait pitié à voir. Craignant que cette petite ne soit traumatisée à vie, je me mis à crier : «Boum !» en riant et en tapant des mains et des pieds à chaque explosion. Ma sœur m’accompagnait.

La petite se calma peu à peu, puis sourit entre ses larmes. Bientôt, elle se prit au jeu et, sa mère s’étant calmée, elle oublia sa peur et se mit à rire aux éclats à chaque explosion.

– Comment pouvez-vous être aussi calme sous les bombes ? demanda son père au mien.

– Nous pourrions mourir d’une autre manière, répondit papa. D’un accident de voiture ou d’une crise cardiaque par exemple. Alors pourquoi me ruiner la vie en me faisant du souci ?

Ce n’étaient pas, comme en 2006 ou comme maintenant à Gaza, des obus de deux tonnes capables d’abattre un immeuble. Les Syriens ne pouvaient pas utiliser leur artillerie la plus lourde au Liban, car les Israéliens leur avaient fait savoir que les bombardements aériens au Liban étaient une ligne rouge qu’ils ne les laisseraient pas franchir. (En 1982, ils mirent leur menace à exécution en détruisant toute la flotte aérienne syrienne en moins d’une heure. Mais en 1990, ils violèrent leurs propres interdictions en autorisant les bombardements et l’occupation de tout le Liban par la Syrie, parce que les Américains le voulaient. Ils tenaient absolument à avoir Hafez el-Assad dans leur coalition contre Saddam Hussein.)

– Tant que vous restez assis dans ces endroits comme ça, il n’y a pas de risque. Ce genre de bombe frappe les humains et ne nuit pas à la solidité de l’immeuble. C’est pourquoi, malgré toutes leurs bombes, Beyrouth est encore debout. Autant qu’ils frappent les murs, notre immeuble tiendra. Les piliers et les plafonds sont en béton armé, faits pour supporter des pressions très élevées. Contrairement aux immeubles anciens dont le poids repose sur les murs qui peuvent s’effondrer si le mur est atteint, comme ceux du centre-ville.

Ma mère faisait les cent pas en égrenant son chapelet et en priant d’un air tragique. Voyant nos réjouissances, elle se mit à gronder :

– Comment pouvez-vous vous amuser ? Moi, quand un obus tombe, je me dis : «Voilà une famille privée de père. Voilà une mère privée de ses enfants. Voilà des enfants devenus orphelins.»

– Mais maman, protestai-je, c’est sur nous que les obus tombent !

Alors elle nous laissa tranquilles et poursuivit ses prières et ses lamentations en silence. Pour nous et le bébé, la soirée se poursuivit gaiement.

Comme il se faisait tard, la petite cessa de rire pour sucer son pouce avec des yeux somnolents.

– Nous allons monter, dirent les voisins.

– Passez la nuit chez nous ! proposa papa. Nous pouvons mettre pour vous un matelas dans l’entrée ; c’est bien abrité. Ou sur le palier si vous voulez plus de sécurité. Personne ne va prendre l’escalier d’ici demain.

– Non, dirent-ils. Nous allons monter dormir chez nous. Les bombardements semblent plus éloignés.

Après leur départ, nous restâmes un moment à raconter des histoires drôles et à nous moquer des politiciens et de l’ennemi. Puis nous allâmes nous coucher.

Cet été-là fut celui où je ris le plus de ma vie. Je pouvais alors être philosophe et rigoler, puisque les bombes tombaient sur moi. C’est quand elles tombent sur les autres que je vivais – et vis encore – dans une angoisse de tous les moments.

Sinon, nous autres, Libanais, nous savons vivre. Non seulement en rigolant ou en priant sous les bombes, mais aussi, en rendant le bien pour le mal. Nous allons jusqu’à rendre service à l’ennemi d’hier en courant à son secours. Lors du tremblement de terre qui a frappé les Syriens, les Libanais ont couru à leur aide, si nombreux qu’ils ont provoqué un embouteillage de minuit à Dahr el-Baïdar. Est-ce qu’un seul Libanais a alors protesté ?

Aucun.

Lina Murr Nehmé

Silence, on viole

Les Blancs au Soudan sont les descendants des Arabes venus d’Arabie, qui prenaient les Noirs en esclavage au VIIe siècle et ont donné leur nom de Soudan (Soud) au pays. Les voyageurs du XIXe siècle font des descriptions terribles du traitement que faisaient ces marchands d’esclaves, et les gravures d’époque ne font que les confirmer.

La lecture de ces textes produit une impression si dure qu’elle ne vous quitte pas de toute votre vie si, comme moi, vous avez passé des mois ou des années à les étudier, à les confronter avec d’autres textes anciens, et à les traduire.

A condition, bien sûr, de ne pas être un crocodile. Moi, en tout cas, ce travail ne m’a pas laissée indemne, et je ne comprends pas, mais vraiment pas, comment il est possible aux historiens de lire, d’étudier ces horreurs, sans en être écorchés pour la vie.

Car les historiens mainstream connaissent ces textes. Certains d’entre eux les citent. Froidement. Puis ils passent outre. Ils racontent ainsi que le fameux “baqt” (pactum?) imposé par les Arabes consistait, pour les Nubiens, à payer “en nature”, avec leurs enfants, la jizya qui leur donnait droit à continuer à pratiquer leur religion sans mourir, et qu’ils n’étaient pas assez riches pour payer avec de l’or.

Mais les Soudanais, les Nubiens et les Nord-Africains n’étaient ni les seuls, ni les premiers à subir ce genre de racket. Bien d’autres l’ont subi de la main des premiers djihadistes dont les djihadistes d’aujourd’hui se font la fierté d’imiter. Dès les premières années de l’islam. Les pays aujourd’hui appelés Azerbaidjan, Arménie, Daguestan, Afghanistan, Géorgie, Pakistan, Inde, etc., avaient résisté à l’islam, et s’étaient accrochés à leurs religions respectives. Mais ce genre de racket, plus des massacres de temps en temps, et tout finit par changer. Les ravisseurs djihadistes poussaient la cruauté jusqu’à exiger, par exemple, que les enfants livrés par ces nations aient “les sourcils noirs et les yeux noirs”, qu’ils soient beaux, et bien sûr, bien formés. Ce qui poussait certaines mères pour épargner le viol à leurs filles ou la honte à leurs fils, à les mutiler.

Le sous-continent indien (aujourd’hui l’Inde, le Pakistan, le Sri Lanka, le Bengladesh), a été particulièrement ensanglanté par ces méthodes. Il arrivait, si l’on en croit les chroniqueurs, que deux cents mille Indiens soient massacrés par les djihadistes pour avoir refusé de changer de religion. Après les batailles, ils prenaient les femmes et les enfants, leur arrachaient les vêtements et les envoyaient, nus jusqu’à la ceinture et sous les cuisses, marcher dans la neige des montagnes séparant le Pakistan et l’Afghanistan. Ils y mouraient de froid, en si grand nombre que ces montagnes furent appelées Hindou Kouch (mort des Hindous). Soit dit en passant, c’est là la raison pour laquelle ils ne tuaient pas les femmes et les enfants à la guerre: parce qu’ils étaient pour les djihadistes une marchandise qui rapportait.

Cette tragédie poursuit au #Soudan, et parfois en Afrique du Nord (#Libye, etc.) sous nos yeux, quand de pauvres Africains rêvant d’argent facile à Paris se retrouvent sous le fouet des esclavagistes en Libye ou en Algérie. N’oublions pas la Tchétchénie et le Levant sous Daesh, qu’une femme politicienne ose proposer d’acheter pour permettre au mari de coucher avec d’autres femmes sans être adultère selon la charia (Voir les textes que j’ai traduits sur l’esclavage d’après cette femme et la charia dans “L’Islamisme et les Femmes”.)

Oui, tuer, violer, vendre le Noir, le Jaune, le Brun ou le Blanc fait partie du #djihad, et se pratique aujourd’hui encore. Mais presque personne ne daigne en parler. Car si Daesh a repris ce racket humain au Levant pour un temps, on voit d’innombrables d’organisations djihadistes enlever des Noirs pour la vente. Les pays du Golfe ont toujours été de gros acheteurs, mais chut ! il ne faut, paraît-il, pas le dire.

Oui, tout se fait dans le silence pour ne pas gêner les acheteurs de contrats d’armes et les vendeurs de pétrole, d’or, de diamants et autres matières premières indispensables à fabriquer les batteries, les téléphones et les ordinateurs portables, et j’en passe.

De temps en temps, il y a un reportage; mais combien le voient? Combien s’en souviennent ? Qui agit? Pas les chefs d’Etat qui veulent être réélus, car le pétrole et les matières premières sont de l’autre côté de la balance.

Honte à l’humanité.

Écrit à Beyrouth par Lina Murr Nehmé, le 7 novembre 2023

Il paraît que l’offensive terrestre approche à Gaza…

Il paraît que l’offensive terrestre approche à Gaza, et j’avoue que je suis terrifiée pour tout ce qui peut arriver, non au Liban – qui en a vu d’autres – mais aux deux belligérants qui, tous deux, l’ont combattu et ruiné.

Les Israéliens, en effet, ne réalisent pas que leur situation est bien plus compliquée que lors de la précédente guerre de Kippour (1973). Ils étaient alors plus motivés, ils étaient plus unis, ils croyaient en eux-mêmes, et les Américains étaient une grande puissance capable de les aider avec un pont aérien. Elle avait l’argent et les armes. Ce n’est plus le cas.

Malgré cette aide, les Israéliens n’ont alors gagné que de justesse. Or cette seconde guerre de Kippour se passe sur leur territoire; et les Palestiniens sont tellement plus forts parce que djihadistes et épaulés par l’Iran et les milices qu’il a entraînées au Liban, en Irak et au Yémen; et les Américains sont au bord de la crise financière (qui, quand elle éclatera, sera mille fois pire que celle du Liban); et ils ont vidé leur arsenal en faveur de l’Ukraine et n’en ont plus guère; et les Israéliens sont au bord de la guerre civile.

Ils ont réussi le prodige d’unir les sunnites et les chiites contre eux. Songez que l’Iran et le Hezbollah défendent le Hamas qui soumet les Palestiniens à une dictature impitoyable et s’approprie les dons qui devraient leur revenir. Et qui, il y a quelques années seulement, trahissait le régime syrien et le Hezbollah et prenait le parti de Daesh contre eux !

Et une fois que le Hamas aura gagné grâce au Hezbollah, croyez-vous qu’il ne se retournera pas contre ce dernier et contre les alaouites syriens, et ultimement, contre l’Iran?

Bien sûr qu’il le fera. L’ouléma médiéval Ibn Taymiyya est le mentor des Frères Musulmans dont le Hamas est la principale branche palestinienne. Or Ibn Taymiyya a décrété le génocide des chiites et des alaouites, bien plus que des juifs.

Ce quelque chose qui fait notre humanité…

Il y a deux commandements de Moïse qui sont peu connus chez les chrétiens, et même chez les juifs. Les voici: “Aime ton prochain comme toi-même”, et “Aime l’étranger comme toi-même”.

Et c’est dommage, car ils sont la clé du bonheur. En effet, on est heureux quand l’autre nous traite aussi bien que lui-même. Et il est heureux si nous le traitons de même.

Je ne pense pas que cette loi universelle puisse avoir moins de valeur à l’échelle des nations, qu’à l’échelle individuelle.

Même durant la guerre.

Il est inévitable qu’une armée se défende quand elle a été attaquée. En 2007, l’armée libanaise a eu face à elle des terroristes islamistes palestiniens du genre du Hamas et des Brigades al-Qassam: le Fatah el-Islam, issu du Fatah el-Intifada, lui-même issu du Fatah d’Arafat.

Et la bataille a eu lieu à cause de l’égorgement, dans leur sommeil, de 20 soldats de l’armée libanaise.

Certes, l’armée libanaise a, dans cette bataille, utilisé ce qu’elle possédait en matière d’artillerie. Elle a frappé dur, et fort. Mais auparavant, elle avait mis une semaine à évacuer les civils de l’ennemi qui n’avaient pas pu – ou voulu – sortir. Toute la journée, durant une semaine, les camions de l’armée libanaise ont fait la navette pour évacuer les civils. Jusqu’aux femmes de Chaker el-Absi, chef du Fatah el-Islam, portées en piaillant par les soldats libanais qui refusaient de commencer la bataille tant qu’ils ne les avaient pas mises à l’abri.

L'armée libanaise évacuant les civilks du camp palestinien de Nahr el-Bared avant la bataille avec le Fatah el-Islam

Cette évacuation des civils de l’ennemi a coûté à l’armée libanaise deux martyrs et plusieurs blessés, ces opérations l’ayant mise durant une semaine en position de vulnérabilité, les islamistes tirant sur elle comme sur les civils palestiniens.

C’est parce qu’elle s’est faite après l’évacuation des civils que la bataille de Nahr el-Bared a été une victoire libanaise non seulement sur le plan militaire, comme sur le plan éthique et moral.

L’armée qui n’épargne pas les civils de l’ennemi est tôt ou tard condamnée par ses propres compatriotes et par sa conscience. Et une fois que le moral est perdu, la guerre est perdue, même quand elle a été gagnée sur le terrain.

On ne peut pas défendre le carnage. On ne peut pas le justifier au nom de ses propres intérêts, car en écrasant l’ennemi, en lui tuant beaucoup de civils qu’on aurait pu épargner parce qu’on veut avoir le moins de pertes possible, on en arrive à se haïr soi-même.

Ceci, quand on est humain. Et il y a toujours, dans un recoin de nos cœurs les plus endurcis, quelque part, quelque chose qui nous pousse à haïr le meurtre.

Lina Murr Nehmé

On ne sert pas la France en insultant le Liban

Le Hamas a appelé à une solidarité internationale et à un djihad le 13 octobre 2013. Le 13 donc, à Arras (nord-ouest de la France), un islamiste ingouche est entré dans son ancien lycée, et il a poignardé un professeur d’histoire, Dominique Bernard, et égorgé un professeur de sport, David Verhaeghe.

Le professeur Bernard est mort en tentant de protéger des lycéens. Le professeur Verhaeghe a été égorgé en tentant aussi de protéger des lycéens, mais il a heureusement survécu.

Suite à ces attentats, et à plusieurs alertes à la bombe qui ont abouti à l’évacuation du Louvre et de Versailles, un internaute a commis le commentaire ci-dessus concernant le Liban.

Je lui ai fait la réponse suivante:

“Monsieur, on ne sert pas la France en insultant le Liban. Et renseignez-vous avant de parler.

1-Il n’y a pas de tels attentats au Liban. Il y en avait sous l’occupation des Syriens et des Palestiniens, parce que ce sont eux qui les commettaient. Eux et ceux qu’ils payaient. Vous n’étiez pas renseignés, c’est vrai. Car depuis Giscard, la politique de la France au Levant est islamiste par crainte d’un nouveau choc pétrolier, et parce que lui et ses successeurs ont fait de la France un pays marchand d’armes. Et comme les Arabes ne donnent rien pour rien, ils achètent ces contrats avec des clauses sous la table, qui impliquent le soutien à leur politique au Moyen-Orient. En d’autres termes, le silence quand ceux qu’ils financent tuent. D’où la fable que la guerre au Liban était civile et religieuse.

En 1989, au nom de cette même politique arabe, la France a accepté de livrer le Liban à la Syrie en reconnaissant une constitution faite en Arabie Saoudite et achetée avec l’argent saoudien, à des députés élus par la génération précédente en 1972. Cette constitution était refusée par la majorité absolue au Liban, toutes communautés confondues, entre autres, parce qu’elle légalise l’occupation syrienne du Liban. Et prive les chrétiens de leur droit à gouverner en tant que majorité. (Car ils sont encore majoritaires, puisque la Constitution ne prive pas les Libanais non résidents de leur nationalité.) Elle les prive en fait de leur droit de participer au gouvernement du pays.

En quoi tout ceci ressemble à la situation en France?

2-Le Liban n’a pas fait entrer les 2 millions de migrants syriens volontairement, et il ne les a pas encouragés à venir. Ainsi, il ne leur donne pas la nationalité libanaise, il ne la donne pas à leurs enfants, il ne leur donne pas de protection inaliénable s’ils sont entrés petits dans son territoire, et il ne les favorise pas par des allocations. Comme il n’y a pas de droit du sol au Liban, les migrants syriens partiront comme ils sont venus, dès que le flux de cet argent européen et américain cessera.

Mais vous, pouvez-vous dire la même chose de ceux auxquels vous avez donné la nationalité française?

3-Les gouvernements américains et européens violent la souveraineté libanaise en payant les migrants syriens au Liban avec des dollars, alors qu’ils ne les paient pas s’ils rentrent en Syrie. N’est-ce pas injuste envers les autres Syriens, de payer ceux qui les ont quittés pour les empêcher de revenir les aider ? Vous trouvez bon que ces migrants soient dans des camps alors qu’ils ont chez eux des maisons en dur, des champs et des amis? Vous ne pensez pas que leur pays a besoin d’eux pour se reconstruire? Vous ne pensez pas que leur armée a besoin d’eux pour pouvoir résister au terrorisme islamique qui est présent en Syrie et qui, en cas de succès, ne manquera pas de frapper la France?

Si vous connaissiez l’Histoire, vous n’attaqueriez pas le Liban. Car il est formé des restes résistants de tous les pays chrétiens de la région. Ces pays qui vous ont donné votre religion, car ils étaient chrétiens bien avant la France. C’est bien parce qu’il est composé de ces ilots de fidélité que le Liban est encore debout. Si cela ne se voit pas, c’est que sous les coups, le Liban est mort. Mais historiquement, il ressuscite toujours très vite, et les signes montrent que ce sera bientôt.

D’ailleurs, oubliez la démographie: au Liban, on est fier d’être chrétien, et les musulmans nous respectent. Dans ce climat, beaucoup de musulmans au Liban se convertissent. Dans la Békaa, un seul prêtre en a baptisé plusieurs centaines.

Est-ce qu’on est fier d’être chrétien en France? Est-ce qu’on y est respecté par la majorité des musulmans?

Lina Murr Nehmé

Migrants et déportés

On s’est beaucoup ému, dans le monde des ONGs et de la part du pape lui-même, pour 6000 migrants qui débarquaient à Lampedusa de façon illégale, sachant qu’on n’aurait moralement pas le droit de les rejeter en mer.

On en a donc beaucoup parlé.

Ces migrants affirment pour la plupart être venus, poussés par le désir d’un enrichissement facile et qui ne coûterait pas cher, puisque les allocations, en France, allaient de soi.

À titre d’info, un demandeur d’asile touche “6,80 euros par jour pour 1 personne + 3,40 euros par jour, par personne supplémentaire. Une majoration de 7,40 euros est prévue par adulte (les enfants ne bénéficient pas de la majoration) en absence d’hébergement”. En même temps, leurs frais médicaux sont gratuits, et ils peuvent bénéficier de distributions de repas gratuits.

Une fois leur situation légalisée, le montant actuel de l’aide (RSA) pour “une personne seule et sans ressources est de 607,75 euros par mois, ou 911,63 € pour un couple sans enfant ou 1276,29 € euros pour un couple avec deux enfants. Le montant de l’aide RSA dépend à la fois de la situation familiale et des revenus du travail.” En d’autres termes, si la famille est plus grande encore et qu’on ne veut pas travailler, on touche davantage d’allocations.

Comment se fait-il, et alors qu’on fait tant de bruit en leur faveur dans les médias, on parle si peu d’un nombre dix fois bien plus grand d’Arméniens déportés ? Le nom ici s’impose, car ils ne partent pas de leur plein gré comme les migrants africains: ils fuient en masse sous la menace d’une extermination comme autrefois, ou d’un bombardement impitoyable.

Les migrants africains ont librement choisi de venir. Pourquoi ne voit-on pas les choses du point de vue des familles de ces migrants ? Ce départ les a privées d’une aide masculine importante pour la culture des champs ou tout autre travail honorable. Et non seulement ces hommes privent leurs familles de cette aide, mais ils les privent aussi des milliers d’euros que coûte la traversée de la Méditerranée. 3000 euros, c’est énorme en Afrique. Et pour quoi? Pour s’étaler par terre et mendier? Ceci, s’ils ne sont pas morts en mer ou en route, et s’ils ne sont pas vendus en esclavage. N’est-ce pas le pire des sorts pour eux?

On ne plaint pas ceux qu’on devrait, et on plaint ceux auxquels on ferait le plus grand bien si on plaignait plutôt leurs familles et leurs pays qui leur ont tout donné, et qu’ils abandonnent au lieu de les servir.

A-t-on le droit d’empêcher un journaliste d’informer ?

Ce n’est pas un secret : dans l’administration en France, c’est Macron qui commande. C’est donc en réalité lui qui a fait perquisitionner le domicile de la journaliste française Ariane Lavrilleux, avant de la mettre en garde à vue durant plus de 40h.

Elle affirme en effet avoir révélé des informations “Secret Défense” concernant les ventes d’armes françaises à l’Égypte, et l’emploi qu’en aurait fait le président égyptien Sissi, y compris pour organiser des surveillances et des frappes contre des trafiquants (des civils) à l’ouest du pays, et non contre les terroristes comme le stipulait l’accord conclu avec les Français.

Ces informations et les photos qui les illustrent ont été publiées par elle sur le site en ligne Disclose.

Quels que soient les résultats de l’enquête, il y a des faits qu’il n’est pas possible d’ignorer: les potentats arabes savent combien la concurrence entre les grandes puissances est serrée en ce qui concerne la vente d’armes. Quand ils signent un contrat, ils imposent au vendeur des clauses secrètes, non écrites, que le partenaire est obligé de respecter. Quant à eux, ils font ce qu’ils veulent, y compris quand les clauses ont écrites.

Si ce que Lavrilleux a révélé est faux, pourquoi la mettre en garde à vue ? Il aurait suffi de la contredire pour la discréditer.

Et si ce qu’elle a révélé est juste, pourquoi cherche-t-on à lui faire révéler ses sources, sinon pour effrayer les autres journalistes et leurs informateurs potentiels ?

Qu’on le veuille ou non, il ne peut y avoir deux poids, deux mesures en politique internationale. Ceci, si on veut que la France soit respectée.

Macron et ses prédécesseurs, et leurs médias d’État, nous ont seriné à longueur de discours des phrases sur le prestige de la France et l’admiration des autres pays pour elle. En réalité, quand vous allez comme un mendiant vendre des armes tout en acceptant de trahir ceux que vous devriez défendre, vous perdez tout respect aux yeux des Arabes. Si seulement vous pouviez entendre ce qui se dit dans les salons huppés, et lire tout ce qui a été publié depuis cent ans ! Au moins, on respectait la France par rapport à l’Angleterre au temps où cette dernière allait et venait finançant les pires despotes arabes pour gagner des avantages financiers et stratégiques.

Mais qu’est devenu le prestige de la France depuis que le Liban, pays ami s’il en est, a été livré pour calmer la colère du roi Fayçal d’Arabie qui, durant la guerre de Kippour en 1973, avait fait subir un choc pétrolier à l’Occident et menaçait de lui infliger des sanctions plus sévères encore ?

Le prestige de la France en a pris un coup plus important encore quand, en 1989-1990, le gouvernement libanais légitime et la population qui manifestait en masse pour le défendre, ont été lâchés pour que l’allié américain obtienne la collaboration du président syrien Hafez el-Assad dans la terrible guerre contre l’Irak.

La presse est un pouvoir plus puissant que le pouvoir politique, car il contrôle les esprits et dicte le vote. Plus un pouvoir est corrompu, et plus il a intérêt à ce que la presse soit, non un témoin, mais un serviteur bêlant qui reste sagement au bercail, et n’en sort que quand le maître le veut.

Lina Murr Nehmé