Archives de catégorie : Liberté d’opinion

“Nul n’est prophète en son pays” !

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“Nul n’est prophète en son pays” !

Au Liban, le Dar el-Fatwa a poliment informé le ministère qu’il devait interdire la diffusion de mon livre “Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur: ce qu’ils cachent” dans le pays.

Cette institution rédige des fatwas, elle interdit des livres: elle est dans son rôle. C’est elle qui a refusé de recevoir une candidate à la Présidence de la République française sans hijab. Et ce, alors que le voile n’est pas obligatoire au Liban. Il est vrai que mes derniers livres parlent du voile, et de sujets sensibles. Impossible d’expliquer le vrai discours de Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur, sans revenir aux textes qu’ils citent.

Si on comprend que ces trois personnages soient protégés par leurs collègues oulémas qui censurent mon livre, on comprend moins facilement pourquoi cette protection s’exerce en France, en Belgique, et dans une moindre mesure, en Suisse. En effet, on vient de me faire remarquer que les bibliothèques universitaires francophones (françaises, belges et suisses) mettaient moins de mes livres à disposition du public que les universités américaines ou allemandes. Ainsi, il est plus facile à un lecteur habitant à Munich, Chicago ou à un étudiant de Harvard ou Stanford de me lire, qu’à un lecteur français, suisse, belge ou libanais !

Et cela est valable pour d’autres auteurs qui parlent un autre langage que celui d’Olivier Roy, Vincent Geisser, Alain Gresh ou François Burgat, qui continuent d’être consultés et interrogés sur leurs protégés.

Comme on ne peut pas censurer franchement, on ignore, ce qui est aussi efficace. Et si cette censure existe, c’est bon signe: c’est que le travail que l’on fait est efficace. Ce qui est inquiétant, c’est que cette censure touche des livres qui aident des pays victimes du prosélytisme et de l’islamisation agressive à y voir clair. Car toute bibliothèque universitaire ou municipale, en France, possède les livres de Tariq Ramadan, de Tareq Oubrou, de Dalil Boubakeur, ou de Ghaleb Bencheikh, pour ne citer qu’eux. Sans parler des bibliothèques musulmanes dans nombre de mosquées, à commencer par la Mosquée de Paris. Et bientôt, qui sait, Mehdi Meklat aura le prix Goncourt. En face, quels sont les livres qui fourniront aux étudiants de quoi se prémunir contre leur discours ?

Je me souviens de cet étudiant que j’avais plusieurs fois entendu, à la Bibliothèque Nationale de France, endoctriner une étudiante voilée qui le regardait avec des yeux passionnés. “Vous allez faire le djihad?”, lui demandait-elle entre deux bouchées de sandwich. C’était en 2009, l’année où j’avais posé à Tariq Ramadan la colle dont j’ai parlé dans “Fatwas et Caricatures” au sujet du mariage d’Aïcha, et de l’esclavage. Qui sait si cet étudiant, et peut-être cette étudiante, ne sont pas allés faire le djihad en Irak ou en Syrie depuis, et ne sont pas, aujourd’hui, des “revenants”?

En 1982, aux Beaux-arts de Paris, quand l’action des islamistes en France était encore assez faible. Je passais mon UV de tapisserie artistique, et face à moi, à travers la trame, un garçon et une fille réalisaient leur tapisserie; le garçon harcelait la fille en lui vantant sa religion et la beauté du chant du muezzin. Sans doute avait-il lu ou entendu les écrits du père de Tariq Ramadan, Saïd, ou ceux de Hamidullah, qui sévissait à l’époque, pour qui toute musique est interdite à l’exception de l’appel du muezzin. Et je devais ainsi subir tout au long de la journée le fredonnement: “Allahou Akbar, Mohamed est l’Apôtre d’Allah!”

Ce matraquage par le haut (lobbying auprès des politiques) et par le bas (propagande et prosélytisme) produit des convertis, des professeurs islamistes et des djihadistes. On l’a payé, des années plus tard, avec les attentats sur le sol français. Le laxisme et la censure actuels se paieront plus cher encore dans un futur proche, car ce genre de mouvement ne croît pas en ligne droite, mais de façon parabolique. Les livres des éditeurs salafistes sont bien en vue à la Fnac; après l’avoir fait remarquer à un vendeur, un de mes lecteurs s’est fait répondre: “Après tout, ce ne sont que des livres !”

Ibn Taymiyya, El-Djazaïri, Qaradaoui et leurs admirateurs. Puis, les islamistes honteux, qui entretiennent la confusion sur les idées et les textes, et se font passer pour modérés dans les colonnes des journaux et sur les plateaux de télévision. S’ils l’étaient vraiment, ne devraient-ils pas commencer par dénoncer ces auteurs qui mènent à la radicalisation, demander leur interdiction ? Et on continue à les prendre au sérieux.

Est-ce normal ? Vous me direz que la France n’est pas tout à fait dans son état normal. Comment peut-on décrier un phénomène, et faire semblant d’ignorer les textes mis en application ? Dans ces conditions, les livres d’histoire qui ne sacrifient pas aux bons sentiments et au romantisme (“histoire”, rappelons-le, signifie “enquête”), ou qui n’enrobent pas les pires commandements d’une “spiritualité” imaginaire ne peuvent pas être bien accueillis.

Les concepts flatteurs, les bons sentiments, l’optimisme béat ne sont pas de circonstance. Pour que l’histoire arme la pensée, il faut qu’elle aille à la rencontre des faits et des textes qui planifient les actes à venir.

Tous mes livres contiennent des centaines de traductions inédites, des documents reproduits en fac-similé, et présentent des faits difficiles ou scientifiques dans un style lisible, pour être accessibles à des lecteurs ordinaires. Ce sont des livres sans jargon. Ce ne sont pas non plus des livres de demi-savants, bourrés d’erreurs et de contresens, sous prétexte de faire de la vulgarisation. Les propagandistes comme Tariq Ramadan ont des mécènes richissimes, et ont des complices haut placés. Je n’ai payé personne. Mais si des gens ordinaires lisent mes livres et en parlent, la cause défendue par ces livres avancera. Même si ceux qui s’en servent et les utilisent pour leur propre production n’ont pas l’honnêteté de les citer.

Lina Murr Nehmé, 10 mars 2019

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Asia Bibi: l’aide américaine aide-t-elle les minorités ?

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Poster américain d’origine inconnue, sur lequel on lit: “Asia Bibi, condamnée à mort pour avoir été chrétienne au Pakistan. Persécution payée par les contribuables américains.”

Ce n’est pas faux, dans la mesure où le Pakistan a, et continue à recevoir beaucoup d’argent américain pour soutenir l’aide pakistanaise, soi-disant contre al-Qaïda et les talibans. Mais entre le bakchich payé par les terroristes d’une part, et l’espoir de ne pas perdre cette mine d’argent, le Pakistan laisse souvent croître les groupes terroristes, qui sont également financés par l’Arabie Saoudite.

Pourquoi? Tout simplement parce que c’est l’existence de ces groupes terroristes qui lui rapporte tant d’argent. Rappelons que le gouvernement pakistanais avait fini par décider de libérer @AsiaBibi et de la renvoyer hors du Pakistan en une semaine parce que, comme l’expliquait son avocat, “Vous ne pouvez pas vivre au Pakistan si vous avez été accusé de blasphème”. En d’autres termes, vous allez mourir.

Si le gouvernement pakistanais ne l’a pas fait, c’est à cause des pressions des groupes terroristes islamistes (notamment le TPL), qui ont exigé:

1- Qu’Asia Bibi et sa famille restent au Pakistan (ainsi il sera possible de les tuer d’une façon ou d’une autre)

2- Que le procès soit revu, alors que la Cour Suprême est l’ultime recours et que la loi ne permet pas de revoir un procès jugé par elle.

Lina Murr Nehmé, 13 janvier 2019

 

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Charlie Hebdo : a-t-on pris conscience du danger ?

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Après quelques livres parisiens, j’avais fait le choix de publier au Liban: c’était plus facile. Je faisais tout, y compris les photos, la maquette, la traduction, les contacts, et j’allais dormir à l’imprimerie pour vérifier l’encrage avant l’impression de chaque planche.

Mais après les massacres du 7 janvier 2015, je me suis dit qu’une guerre civile menaçait, et j’ai décidé d’écrire sur ce sujet pour expliquer aux Français ce qu’ils ne savaient pas des fatwas appelant au meurtre de l’insulteur de Mahomet, et de ce que peut penser un terroriste qui les applique et vient tuer en plein Paris. Car ces prescriptions et cette propagande programment un cerveau humain comme un robot.

Les djihadistes sont littéralement robotisés. Je sais que je risque d’être mal comprise, ça ne manque jamais quand je dis ces mots: “ce sont de pauvres types, la faute est à l’idéologie.” On abat, on expulse ou on emprisonne des hommes, mais l’idéologie reste intacte, parce que personne n’ose la nommer, et encore moins la combattre. Pourtant, qu’est-ce qui compte vraiment? L’idée? Ou l’être humain?

Malgré cela, j’hésitais à parler franchement de tout. De ma vie, je n’avais jamais signé de livre parlant hardiment d’islamisme, car après tout, je tiens à ma précieuse vie, contrairement aux islamistes, à qui on a appris à désirer la mort.

C’est mon éditeur, Yves Briend, qui m’a écrit en corrigeant le manuscrit: “Pourriez-vous introduire le califat ? Pourriez-vous introduire Tariq Ramadan ?” Deux sujets que j’avais contournés comme on contourne une montagne. Alors j’ai réalisé qu’à force de contourner les épines, on ne fabrique pas des perles, mais des huitres vides. On n’allait rien comprendre si je ne prenais pas l’animal à bras-le-corps. Si je voulais vraiment un résultat, il ne fallait pas être lâche. J’ai donc décidé d’ajouter des chapitres, qui sont les plus explosifs du livre.

Explosifs ? Vous avez dit explosifs ?

Pendant que nous parlions du manuscrit, Yves Briend me dit, pensif et le cou plié sur le papier :

“Et moi, on va me mettre une bombe.
— Si vous voulez, ne l’éditez pas, dis-je sèchement.
— Si, si, dit-il catégoriquement, on va le faire !”

On ne peut pas ne pas estimer un homme pareil, même si nos disputes étaient mémorables.

Trois mois plus tard, il me dit, irrité: “Vous avez montré des choses évidentes mais qu’on n’avait pas remarquées. C’est ça, la valeur de votre livre. Maintenant, je vois les émissions télévisées, je vois les rangées de livres dans les librairies, je lis les journaux et les magazines, ils disent la même chose que vous, et ils ne le disaient pas avant votre livre. Mais ils ne vous citent pas. C’est inacceptable!”

Dois-je être vexée parce que certains me pillent sans me citer ? Ou dois-je au contraire me réjouir d’avoir contribué à un mouvement de vérité et de hardiesse ? Mais qu’est-ce que le médecin cherche ? les bravos, ou l’efficacité ?

Avant “Fatwas et Caricatures”, on ne pouvait pas parler franchement de ces sujets sans se faire traiter de facho. Et beaucoup de gens, qui partageaient les analyses de ce livre en privé, avaient honte de leurs opinions en public.

Maintenant, on peut en traiter de façon humaine, rationnelle, scientifique, sans passion, mais aussi, sans fard: comme un médecin qui dit qu’un patient a le cancer. Il n’a rien contre le patient, mais il en a contre le cancer.

“Fatwas et Caricatures”, c’est le diagnostic du médecin qui aime trop le malade pour le tuer en lui disant qu’il va bien alors qu’il est cancéreux.

Oui, il y a un problème. Et je m’adresse à tous ceux, parmi les politiciens, journalistes, lecteurs ou curés qui ne m’adressent plus la parole depuis qu’il ont feuilleté (et non lu) ce livre. Il vous dérange parce qu’il introduit le scalpel de l’analyse là où les commentateurs maquillent sciemment les faits ou se répandent en flagorneries.

L’amour ne consiste pas à flatter un cancéreux. Il consiste à lui dire la vérité qui frappe comme un bistouri et qui dérange tellement qu’il a envie de se débarrasser de la tumeur en l’ôtant de son corps. Sachant que cela fait mal et qu’il lui faut du courage pour accepter cette douleur.

 

Lina Murr Nehmé, 6 janvier 2019

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Dans les prisons soudanaises et pakistanaises

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Cette image a été publiée il y a quelques années pour essayer de sauver Meriam Yahia Ibrahim, une Soudanaise condamnée à cent coups de fouet pour adultère pour avoir épousé un chrétien, et condamnée à mort pour apostasie, parce qu’elle était devenue chrétienne. Sauvée par l’action des Occidentaux, elle a pu quitter le Soudan.

Pourvu qu’il y ait beaucoup d’actions de ce genre pour sauver ceux qui croupissent dans les terribles prisons du Soudan et du Pakistan pour avoir usé de leur liberté de conscience, et empêcher qu’il y ait encore des morts à cause de la libération d’Asia Bibi au Pakistan…

Mais il n’y a pas qu’Asia Bibi. Je travaille en ce moment sur l’histoire d’un épicier chrétien, non loin du village d’Asia Bibi, dont le voisin convoitait le local pour agrandir sa propre entreprise. N’ayant pu le convaincre de partir, il le convainquit de brûler un livre en arabe (langue que l’autre ne connaissait pas). Puis, quand ce fut fait, il ameuta le quartier en criant qu’Imran avait brûlé le Coran. Il rassembla 400 émeutiers décidés à lyncher l’épicier, Imran Massih, ainsi que ses frères. Ils les battirent férocement et jetèrent sur eux de la paraffine pour les brûler vifs.

La police étant intervenue, ils revinrent avec 600 autres forcenés et attaquèrent à 1000 le poste de police en jetant des pierres et en exigeant qu’on leur livre Imran pour pouvoir le pendre. Finalement la police céda et le déclara blasphémateur. Il fut emprisonné.

Depuis, son avocat a été menacé pour laisser tomber le cas. Il a refusé, on a essayé de le tuer. Les associations de droits de l’homme ont exigé une enquête réelle. Alors les cendres des livres brûlés par Imran furent examinées. Le livre arabe n’était pas le Coran. Ali l’avait accusé faussement. Imran demeura pourtant en prison, et sa famille dut s’enfuir en abandonnant son commerce. Les autres familles du quartier étaient aussi menacées.

Lina Murr Nehmé, 27 décembre 2018

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Je voudrais signaler que pour une femme née chrétienne ou juive et dont la conversion à l’islam fait un bruit fou, il y a, chaque jour, des centaines de musulmans qui se convertissent à l’athéisme ou au christianisme. Et personne n’en parle.

Pourquoi n’en parle-t-on pas?

Tout simplement parce que personne n’a été tué pour avoir quitté le christianisme ou le judaïsme.

Lina Murr Nehmé, 16 novembre 2018

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Assia Bibi, CEDH: la censure, symptôme d’une passation de pouvoirs ?

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Au Pakistan, les islamistes deviennent fous parce qu’une femme, Asia Bibi, n’a pas été tuée alors qu’on l’accuse d’avoir attaqué l’islam (et réciproquement, on avait attaqué le Christ devant elle, mais c’est permis au Pakistan apparemment). Et en Europe, au contraire, on tend à punir de simples citations.

Ainsi, Georges Bensoussan a été traîné en justice pour avoir simplement cité un auteur maghrébin parlant d’antisémitisme au Maghreb; Facebook censure des pages qui en disent cent fois moins que les pages islamistes qui sont autorisées en arabe (et je lis les deux).

En Autriche, et aussi à la Cour européenne des droits de l’homme, on tire dans le même sens exactement, pénalisant ce que l’islam appelle blasphème, et non ce à quoi le christianisme ou le judaïsme donnent ce nom.

On assiste à une sorte de passation de pouvoirs. Au Pakistan, quand les Anglais régnaient, et même après que les Pakistanais eurent pris le pouvoir (et cela dura jusqu’au temps de la dictature dans les années 1980), on ne tuait pas une femme pour avoir répondu à une autre, même si l’échange concernait les religions.

Maintenant, en Autriche, on punit une femme d’avoir simplement traité un concept religieux pakistanais avec des critères légaux autrichiens. L’affaire, présentée à la Cour Européenne des droits de l’Homme, eut le même jugement.

Dans les trois cas, en Autriche comme au Pakistan, ou devant la Cour européenne des droits de l’homme, on en arrive au même jugement, à la même conclusion, qui est aussi la même qu’en Arabie Saoudite, qui est aussi la même que chez Daech: une seule religion au monde est reine, elle est sacrée, elle l’est sous tous les cieux, même là où elle est minoritaire. Au nom du respect des sentiments d’autrui, il est interdit, non seulement de la caricaturer, mais même de la citer en rapport avec les standards européens. Quant aux autres, au nom de la liberté d’expression, elles peuvent être insultées ou caricaturées, même là où elles sont majoritaires.

Le rêve du cheikh Qaradawi, d’une invasion calme et douce de l’Europe, du style euthanasie, une invasion différente de la précédente… se réalise peu à peu. Le cheikh Qaradawi avait promis une invasion de Rome. Il fallait le voir en parler sur la télévision al-Jazeera, et de quel un air rêveur. C’est bien lui qui a légalisé les attentats-suicides, à condition qu’ils visent certaines catégories de population: les juifs ou les alaouites, par exemple. C’est lui qui, d’un seul cri, orchestra les manifestations violentes dans le monde entier, contre les chrétiens à cause des caricatures de Mahomet de 2005, manifestations-émeutes qui aboutirent à des pogroms avec incendies de maisons et d’églises, coups et blessures et assassinats au Pakistan, et surtout au Nigéria, où plus de cent personnes furent tuées pour des caricatures dont elles ne savaient rien.

Ne voyez-vous pas, dirait le Frère Qaradawi s’il nous lisait, ne voyez-vous pas le Vatican devenir une mosquée, Notre-Dame de Paris et Notre-Dame de Chartres devenir des mosquées, et la cour européenne de justice, une cour régie par la charia?

Je ne comprends pas comment mon père a pu, après la Deuxième Guerre mondiale, dénigrer l’héritage que leur avait laissé la génération précédente. Un jour qu’il énumérait à mon grand-père tous les maux que sa génération avait créés, guerres et autres, mon grand-père lui dit: “Ecoute, mon fils, j’ai été condamné à mort deux fois, et banni une fois. Je ne pouvais pas faire plus.”

Du moins n’a-t-il été condamné à mort par contumace que par les Jeunes Turcs en 1916 et par les nazis en 1944, puis banni par les Libanais en 1948. De nos jours, les condamnations des régimes criminels (Daech, al-Qaïda, Nosra, etc.) par contumace se font au grand jour, par le biais des réseaux sociaux.

J’en ai trop vu, et je ne m’accroche à la vie que pour servir, avec le désespoir de l’enfant qui bouchait les trous du barrage avec ses doigts, et qui, à la fin, n’avait plus assez de doigts pour pallier à toutes les fissures. Mon temps finira, j’espère, avant que le drapeau de Daech ne flotte sur Beyrouth ou sur l’Europe, car voir cela, pour moi, serait bien pire que de mourir.

C’est là la différence entre moi, et le cheikh Qaradawi. Vous remarquerez que j’ai mis mon nom avant. C’est exprès, parce que je suis femme et parce qu’il est lui.

Lina Murr Nehmé, 2 novembre 2018

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Asia Bibi : vers une libération ?

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Asia Bibi est entre la mort et la vie.

Par principe, quand on n’a pas la même religion, c’est qu’on n’est pas d’accord. Cela ne devrait pas être punissable, surtout dans la communauté indienne dont est issu le Pakistan, et qui a été chrétienne bien avant la venue de l’islam. Les Indes, en effet, ont été évangélisées par saint Thomas l’Apôtre, et son tombeau se trouve là-bas.

Malheureusement, au Pakistan et en Inde, il y a des fanatiques criminels. Lors de l’affaire des caricatures danoises, des chrétiens ont été assassinés au Pakistan.

S’ils tuent des chrétiens de leur pays parce que des Danois ont fait des dessins, a fortiori les tueront-ils s’ils ont eux-mêmes dit quelque chose.

Donc, comme par sadisme, Asia Bibi est traînée en prison et va de procès en procès depuis très, très longtemps pour cause de “blasphème”. Est-il normal, est-il humain, est-il acceptable de faire traîner ce procès durant tant d’années, faisant vivre cette fille dans l’angoisse parce qu’elle est chrétienne, faisant vivre ses parents dans l’angoisse, et pour finir, annoncer qu’on la tuera?

Maintenant, elle est entre la mort et la vie. Certes, la mort n’est pas une fin, mais on préfère qu’elle vive le plus longtemps possible.

Toutes nos sympathies et nos affections à une jeune fille courageuse. En espérant qu’à la dernière minute, comme pour Dostoïevski, les choses pourraient se retourner et qu’elle soit sauvée.

Mais pas elle seule. Tous ceux qui, comme elle, croupissent dans les geôles de l’injustice dans le monde entier.

 

Lina Murr Nehmé, 16 octobre 2018

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Que vont prêcher les 100 imams algériens arrivés en France ?

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Le gouvernement français a consenti à ce que le gouvernement algérien envoie 100 imams prêcher en France pour le ramadan. Ils sont venus s’ajouter aux 150 autres imams algériens qui ont statut de fonctionnaires algériens en France.

On aimerait savoir pourquoi monsieur Macron autorise l’Algérie à prosélytiser en France, alors qu’en Algérie, les chrétiens algériens perdent leur citoyenneté, qu’ils sont mis en prison, que leurs lieux de prière sont saccagés. Le Président et son ministre de l’Intérieur auraient pu, avant d’autoriser ces imams à venir prosélityser en France, exiger que le gouvernement algérien cesse de persécuter ses citoyens quand ils osent exercer la liberté d’opinion ! Car un Algérien perd sa nationalité algérienne s’il devient chrétien, juif ou athée !

Peut-être que ces messieurs du gouvernement français ne savent pas que le sujet le plus important que traitent les prédicateurs en général durant le mois de ramadan est le djihad. Le ramadan est appelé le “mois du djihad”. C’est en effet durant ce mois que Mahomet a monté ses campagnes militaires les plus importantes, celle par laquelle il a commencé, et celle par laquelle il a fini sa guerre contre les Mecquois. La première était, en 622, la bataille de Badr, qui aboutit à la mort de 70 doyens — donc vieillards — mecquois tués alors qu’ils étaient assoiffés et privés d’eau, et épuisés par un long voyage dans le désert, et qu’ils avaient le soleil dans les yeux. La deuxième était celle de la conquête de La Mecque en 630.

Les oulémas prêchent l’obéissance au Coran et à la Sunna. La Sunna, ce sont les paroles et les actes de Mahomet, qu’il faut imiter en tout car le Coran dit: “Vous avez vraiment en l’Apôtre d’Allah un bon exemple à suivre.” Si Mahomet a imposé l’islam par la force et la violence durant le mois de ramadan à ses compatriotes mecquois, les terroristes comprennent qu’ils doivent faire de même.

La lecture de la biographie de Mahomet est recommandée avec la plus grande chaleur par les imams algériens, ainsi que par le programme de l’Institut pour imams de la Grande Mosquée de Paris, qui est partiellement financé par l’Algérie, laquelle impose ce programme. Pour avoir une idée du genre de choses que fait enseigner l’Algérie en France, je suggère la lecture de mon livre Tariq Ramadan, Tareq Oubrou, Dalil Boubakeur: ce qu’ils cachent, qui n’a rien perdu de son actualité après l’arrestation de Tariq Ramadan.

Même si l’imam est modéré au point de ne pas citer le passage concernant le massacre des vieillards à Badr durant le ramadan — et il est rare qu’un imam ne prêche jamais pour glorifier la victoire de Badr —, il renvoie obligatoirement ses lecteurs à des livres qui le font, notamment la Sira de Mahomet par Ibn Hicham, et le Hadith. L’enseignement ne se fait pas seulement en parlant. il se fait aussi par le biais des textes qu’on ordonne aux gens de lire et d’assimiler.

Il conviendrait de cesser de se mentir mutuellement, de cesser de prétendre qu’il existe un vivre-ensemble quand de telles choses se disent, se publient, se lisent dans un pays comme la France. S’il y a la guerre, qu’on nous le dise, mais ouvertement, pas de bouche à oreille, pas par le biais d’allusions ou de rébus, pas par le biais de livres.

Ce n’est pas le vivre-ensemble qu’il faut prôner. Le vivre-ensemble, c’est vivre l’un à côté de l’autre en chiens de faïence. C’est le “s’aimer mutuellement” qu’il faut prôner, car l’amour aurait exclu le mensonge, la duperie que nous constatons tous les jours.

Et c’est cela qu’on ne voit pas. Pourtant, c’est la seule chose qui puisse encore sauver la France.

Lina Murr Nehmé, 24 mai 2018

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